Irak, après la libération de l’otage italienne : L’armée d’occupation tire sur tout ce qui bouge09/03/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/03/une1910.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Irak, après la libération de l’otage italienne : L’armée d’occupation tire sur tout ce qui bouge

Giuliana Sgrena, journaliste du quotidien italien d'extrême gauche Il Manifesto, enlevée le 4février à Bagdad, a été libérée vendredi 4 mars. Mais les conditions dans lesquelles a eu lieu cette libération ont provoqué une crise entre les États-Unis et l'Italie, pays qui entretient un contingent de 3000 hommes en Irak aux côtés des troupes américaines.

C'est à la suite de négociations secrètes avec les ravisseurs que des émissaires italiens avaient obtenu que Giuliana Sgrena soit relâchée. Mais les trois policiers italiens qui avaient pu recueillir la journaliste à un rendez-vous convenu dans un quartier de Bagdad, et se rendaient avec elle à l'aéroport, ont été accueillis par le feu nourri d'une patrouille américaine. Dans leur voiture criblée de balles, la journaliste et deux policiers ont été blessés, et le troisième tué sur le coup alors que, selon les témoignages, il cherchait à protéger Giuliana Sgrena de son corps. Ainsi, si la journaliste a été libérée, ce dont on ne peut que se réjouir, c'est au prix de la mort, sous le «feu ami» de soldats US, de l'agent qui avait mené les négociations pour sa libération.

Selon les autorités italiennes, les forces américaines avaient été dûment prévenues de l'opération et n'avaient donc aucune raison de penser que les occupants de cette voiture qui s'approchait, d'ailleurs à vitesse réduite, avaient des intentions hostiles à l'égard des soldats américains en faction sur la route de l'aéroport.

Alors, le feu de la patrouille américaine a-t-il été délibéré, comme le disent certains, parce que les États-Unis, n'acceptant pas la négociation avec les ravisseurs, ne voulaient pas laisser la journaliste sortir vivante de l'affaire? On ne le saura sans doute jamais, comme on ne saura sans doute jamais qui se cache vraiment derrière ces enlèvements, ni à quel jeu se livrent les différents services secrets. Mais l'explication la plus simple et la plus probable est que la patrouille américaine a tiré comme elle fait d'habitude: sur tout ce qui bouge.

Car la règle la plus fréquemment appliquée par l'armée américaine est de tirer d'abord, d'aller voir ensuite. Des dizaines, peut-être des centaines d'Irakiens en sont victimes chaque semaine sans qu'aucun diplomate, aucun président du Conseil, ne demande d'explications sur leur sort et sans que beaucoup de journalistes en parlent. D'ailleurs, même parmi les morts de l'armée américaine et de ses alliés, combien déjà sont morts sous les balles, les bombes ou les obus «amis»?

Les soldats qui le 4 mars ont mitraillé la voiture de l'otage italienne libérée ont donc sans doute, tout simplement, fait comme d'habitude. Et même si, pour une fois, on leur demande des comptes, cela ne changera rien au comportement de cette armée d'occupation.

Quant au gouvernement italien, qui devant l'émotion provoquée dans le pays est obligé de protester auprès du gouvernement américain, il n'a qu'une chose à faire: retirer immédiatement ses troupes, dont la présence en Irak est tout aussi injustifiée, et criminelle, que celle des troupes américaines.

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