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Dans les entreprises
Cantines SNCF - Paris Sud-Est : Quand les syndicats jouent les patrons
Ce qui se passe dans les cantines de la SNCF, gérées par le Comité central d'entreprise et par les Comités d'établissements régionaux, illustre la contradiction dans laquelle les dirigeants syndicaux ont engagé une partie de leurs militants, transformés en gestionnaires et même purement et simplement en patrons des personnels des cantines.
Récemment, le Comité d'établissement régional (CER) Paris Sud-Est s'est trouvé confronté à une journée de grève des employés des cantines, qui ne supportent plus les conditions de salaires et de travail qui leur sont imposées. Ils répondaient ainsi à un appel lancé aux personnels de toutes les cantines des 26 CER existant à la SNCF, par leurs propres délégués du personnel Sud et CGT.
Le mardi 11 janvier, jour où le montant de la dotation de la direction SNCF pour le fonctionnement des CE était annoncé, les employés des cantines venus des quatre coins du pays se sont retrouvés au siège de la direction, à Paris. Ils demandaient que les patrons des cantines (donc, les délégués élus aux Comités d'établissement, majoritairement CGT) respectent le règlement et la convention collective des employés de CE. En particulier, ils refusaient que certains d'entre eux continuent à être payés en dessous du smic (en effet un travailleur de Dijon a fait tout son «déroulement de carrière», comme on dit, en dessous du smic).
La convention collective prévoit que, tous les trois ans, chaque salarié ait trois points en plus, alors que dans bien des cantines ce n'est absolument pas respecté. Aujourd'hui, les employés font 35 heures hebdomadaires (de 7h20 à 14h50, avec deux pauses, de dix minutes le matin et de trente minutes pour déjeuner) pour un salaire minimum. Autre revendication: le maintien des emplois, car beaucoup de ceux qui partent en retraite sont remplacés par des travailleurs précaires, quand ils le sont, alors que la charge de travail, elle, ne diminue pas.
Personne ne pense qu'une seule journée de grève peut suffire à obtenir satisfaction. Le 11 janvier, il s'agissait surtout d'affirmer qu'il n'était plus question de se résigner, sous prétexte que les patrons des cantines sont des syndicalistes CGT (mieux vaudrait dire plutôt des gestionnaires issus des rangs de la CGT). Depuis 1986 (date du transfert de la gestion des activités sociales aux syndicats), chaque fois que les cheminots sont appelés à débrayer par les organisations syndicales, les employés des cantines ont répondu eux aussi «présents». Ils demandent, aujourd'hui, que les cheminots et leurs organisations syndicales soient solidaires de leurs revendications et se sont donné rendez-vous d'ici quelques semaines, le jour où une nouvelle réunion avec la direction SNCF aura lieu.
Dernier point: l'un des arguments préférés des patrons des cantines, pour ne pas répondre à nos requêtes, consiste à déclarer que la dotation de la SNCF aux Comités d'établissement est trop faible et qu'elle a baissé. Peut-être, puisqu'elle est proportionnelle à la masse salariale, donc fonction en partie du nombre d'emplois à la SNCF, emplois qui n'ont pas cessé de diminuer depuis plusieurs années. Mais aucun des employés des cantines n'en est responsable.
En 2003, l'estimation de la dotation pour les activités sociales diverses, dont les cantines, s'élevait à environ 1,7% de la masse salariale brute nationale, soit un montant d'environ 87 millions d'euros répartis entre les différents CE. C'est insuffisant pour faire fonctionner correctement toutes les activités, déclarent les organisations syndicales. Certainement. Mais ce qui est très insuffisant, ce sont les salaires de tous, cheminots et employés de la cantine. Et ce qui est totalement superflu, c'est l'engagement des syndicats dans cette gestion financière des cantines (et autres activités dites sociales), qui les conduit à agir à la place de la direction de la SNCF, comme n'importe quel patron, contre les intérêts des salariés.