Togo : Démission en trompe-l'oeil du fils-dictateur03/03/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/03/une1909.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Togo : Démission en trompe-l'oeil du fils-dictateur

Vendredi 25 février, Faure Gnassingbé, fils de l'ancien dictateur, le général Eyadéma, et qui s'était autoproclamé, aidé par l'armée, président du Togo "par intérim", a annoncé qu'il renonçait à la présidence, et que des élections seraient organisées dans les deux mois qui viennent.

Depuis la prise du pouvoir par le fils du dictateur défunt, le 5 février dernier, l'opposition togolaise n'avait cessé de protester contre le coup d'État. Elle réclamait la démission de Gnassingbé, et condamnait l'éviction de l'ancien président de l'Assemblée togolaise, qui aurait dû assurer l'intérim de l'ancien dictateur, selon la Constitution togolaise.

Des manifestations organisées dans les rues de Lomé, la capitale du pays, ont amené les instances internationales à prendre quelques distances avec le nouveau président. Tour à tour, l'Union Africaine, l'ONU, et même Bongo, président du Gabon, pourtant présenté comme un de ses parrains, auraient incité l'apprenti-dictateur à respecter le cérémonial constitutionnel.

Ils ont été entendus. Gnassingbé a cédé provisoirement sa place, promettant de "garantir la transparence" des futures élections, et de "donner les mêmes chances à tous les candidats". La main sur le coeur, il a ajouté : "Il y a un temps pour les luttes et les conflits d'intérêts, il y a un temps pour la paix des coeurs, la tolérance, la réconciliation..."

Et dès le lendemain, se satisfaisant de ces belles paroles, la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest s'est félicitée de cet "acte positif", et a annoncé la levée immédiate des sanctions économiques contre le Togo. Le président du Nigeria, qui est aussi président de l'Union africaine, a présenté le geste de Faure Gnassingbé comme "la victoire de l'Afrique et du monde". Et Koffi Annan, secrétaire de l'ONU, l'a lui aussi chaleureusement félicité.

Pourtant, la mainmise de l'ancienne dictature reste totale. L'ancien gouvernement, mis en place par Eyadéma, reste en place, sans parler de l'état-major militaire qui avait porté le fils au pouvoir. L'ancien président de l'Assemblée nationale évincé, et qui était en droit d'assurer l'intérim, est maintenu à l'étranger par la fermeture des frontières qui lui interdit de revenir au Togo. Celui qui le remplace est un dirigeant du parti au pouvoir, proche des dictateurs, père et fils.

Quant au principal candidat de l'opposition, à qui Faure Gnassingbé promettait "l'équité" en lui donnant "les mêmes chances...", il est interdit de candidature en vertu d'un article de la Constitution togolaise taillé sur mesure qui impose d'avoir résidé au Togo pendant les douze mois précédant les élections. Pas de chance, il est en exil.

Le ministre des Affaires étrangères, Michel Barnier, avait déclaré le 8 février dernier : "Ne demandez pas à la France d'être le gendarme de l'Afrique : ce n'est pas l'ambition ni la vocation de notre pays." On le comprend. L'État français avait trouvé dans Eyadéma père un dictateur qui avait fait le sale boulot pendant 38 ans sans discontinuer. Alors, on peut penser que le fils, dès qu'il aura été "élu" constitutionnellement, lui aussi fera l'affaire.

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