De l’argent, il y en a de plus en plus dans les caisses du patronat09/02/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/02/une1906.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

De l’argent, il y en a de plus en plus dans les caisses du patronat

Comme de coutume, le patronat se refuse obstinément à céder la moindre augmentation de salaire conséquente. Il se réfugie derrière l'alibi de la concurrence. Ainsi, selon le président de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution, «augmenter les salaires, si c'est pour créer du chômage, n'est pas une solution. La priorité est d'avoir une main-d'oeuvre compétitive afin de lutter contre les délocalisations.»

Un discours servi, à peu de chose près, aux métallos comme aux caissières de supermarché, aux employés de banque comme aux ouvriers du bâtiment. C'est se moquer du monde, car l'argent versé aux actionnaires ne cesse, lui, d'augmenter et personne ne les accuse de mettre en danger la vie des entreprises. C'est même le critère invoqué dans les milieux financiers pour valoriser l'entreprise et sa direction.

D'après les chiffres de l'Insee, la part des salaires dans la valeur ajoutée des entreprises entre 1982 et 2003 a chuté de 72,5% à 65%. Cela signifie qu'une part de plus en plus faible de la richesse créée par leur travail revient aux salariés. Tout au long de ces vingt années, le patronat a fait pression tant qu'il a pu en utilisant le chômage. Les gouvernements de gauche et de droite qui se sont succédé ont aidé les patrons à imposer leur loi, en organisant le blocage des salaires, en augmentant les prélèvements sociaux ou en favorisant l'explosion du travail précaire et à temps partiel. Il n'y a pas de Premier ministre, qu'il soit de droite ou qu'il appartienne au PS, qui n'ait apporté sa pierre à cette baisse programmée des moyens d'existence du monde du travail. Le résultat en a été un appauvrissement continuel de la classe ouvrière, dont toute une partie ne peut plus aujourd'hui se loger, se vêtir correctement ou payer régulièrement ses factures d'eau ou d'électricité. Ne parlons même pas de ceux qui sont privés d'emploi!

Si les profits des grosses entreprises ont explosé, une part de plus en plus grande en a été reversée aux actionnaires sous forme de dividendes, au détriment des investissements. En l'espace de vingt-cinq ans, ces dividendes ont été multipliés par seize. Dans les années quatre-vingt, 35% des bénéfices étaient distribués aux actionnaires. Ce chiffre est aujourd'hui passé à 50%, et les PDG n'ont manifesté aucune inquiétude sur les risques que cela pourrait représenter par rapport à la concurrence. À ce niveau, l'argument que l'on sert aux salariés joue d'autant moins que c'est partout pareil! Selon la Société Générale, les entreprises européennes ont versé en 2004 à leurs actionnaires 199 milliards d'euros, soit 10% de plus qu'en 2003. Le spectre des délocalisations, dont on menace les salariés, ne franchit manifestement pas les portes des conseils d'administration où se décident les dividendes! Et bien sûr, quand il s'agit de leur propre rémunération, les PDG s'alignent sur les pourcentages à deux chiffres des actionnaires plutôt que sur le blocage des salaires qu'ils imposent aux travailleurs de leur société.

Tous les discours faits pour justifier le blocage de fait des salaires au nom de la concurrence, de la compétitivité, de la mondialisation et on en passe, ne sont qu'une entreprise de mystification, pour camoufler tout simplement le transfert d'une part sans cesse croissante de notre travail dans les caisses du patronat.

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