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Hôpital psychiatrique de Saint-Venant (62) : La pénuriede personnel conduit au drame
Jeudi 13 janvier au soir, un malade de l'hôpital psychiatrique de Saint-Venant (Pas-de-Calais) a été étranglé par un autre patient.
Cela s'est passé dans une unité récemment ouverte, pompeusement appelée SAAS ou «structure alternative d'accueil spécialisé», regroupant des résidents non dangereux, hospitalisés de longue date. Il s'agissait en fait de sortir des services de psychiatrie des patients qui ne trouvaient aucune structure d'accueil à l'extérieur, «engorgeaient» les services d'admission et dont personne ne voulait. Ils sont trente-neuf, entourés, la nuit, par six salariés soignants. Mais cette nouvelle unité n'a pu être ouverte que par redéploiement interne de personnel, issu des autres services sans aucune embauche. La direction continuant d'habiller Pierre en déshabillant Paul... puis se lamentant de la pénurie de personnel!
La direction de l'hôpital multiplie les déclarations pour minimiser les choses et affirmer que cet événement «revêt un caractère exceptionnel et imprévisible». Elle reconnaît pourtant dans la presse que le personnel doit subir beaucoup de choses: «bousculades, menaces, coups...». Quant au directeur de l'Agence régionale de l'hospitalisation, on l'entend «féliciter le personnel pour son sang-froid». Tous ces soi-disant responsables se moquent du monde, ils savent que rien n'est prévu pour les situations de crise pourtant nombreuses en psychiatrie.
Le manque de personnel est criant depuis bien longtemps. Des unités fonctionnent la nuit avec un seul soignant, souvent une femme, sans aucun moyen de communication mis à disposition, et il y a longtemps que les syndicats réclament au moins deux soignants par unité la nuit.
La direction semble se rendre compte seulement maintenant des problèmes de sécurité alors qu'il y a eu ces dernières années de très nombreux incidents et agressions (l'an dernier, 40 incidents ont été déclarés). Mais on semble avoir oublié aussi les nombreuses fugues de patients, les tentatives de suicide, des incendies, etc.
La presse répète sur les antennes que 1 600 soignants s'occupent d'environ 300 malades mais elle «oublie» de préciser que de nombreux malades sont en «structure extérieure» (appartements thérapeutiques, hôpitaux de jour, ou autres) et que les soignants s'occupent aussi de tous ces malades.
C'est un mensonge de dire qu'il n'y a pas de manque de personnel. Il manque des médecins, dit le président de la Commission médicale d'établissement, mais le contrat de quatre d'entre eux n'a pas été renouvelé en 2004, sans aucune explication fournie. Il manque des infirmiers, des aides-soignants, notamment la nuit où du personnel doit parfois renforcer une unité en cas de problème avec un patient, délaissant par là son propre service.
L'Établissement public de santé mentale de Saint-Venant (EPSM) est probablement un des seuls établissements de cette taille en France à ne pas disposer d'un psychiatre de garde sur place. Un bâtiment flambant neuf de un million d'euros a été construit en 2003 mais il n'est toujours pas ouvert faute de moyens.
L'EPSM a également été retenu par la tutelle pour accueillir les détenus qui présentent des problèmes psychiatriques en prison, et ce sans moyens supplémentaires ni surtout toujours les locaux adaptés et sécurisés, d'où une évasion l'an dernier relatée dans la presse où un détenu a fugué de l'EPSM pour cambrioler une maison, y voler une arme et se retrouver dans la nature
Alors, le ministre de la Santé, Douste-Blazy, peut ordonner une enquête administrative ou promettre un grand plan de santé mentale de 200 millions d'euros : en réalité, il n'est pas prêt à mettre le nombre de soignants nécessaire et suffisant pour que les problèmes ne puissent pas devenir des catastrophes, dans la lignée de toute la politique des gouvernements depuis des années.