- Accueil
- Lutte ouvrière n°1902
- Il y a 30 ans, la loi Veil - IVG : Un droit à faire respecter
Divers
Il y a 30 ans, la loi Veil - IVG : Un droit à faire respecter
Le 17 janvier 1975 paraissait au Journal Officiel le texte de la loi Veil reconnaissant enfin aux femmes le droit d'interrompre une grossesse non désirée dans des conditions médicalisées.
Trente ans plus tard, ici, bien des difficultés persistent et, dans de nombreux pays, ce droit élémentaire reste à gagner.
Une loi imposée par les luttes des femmes
On a peine à y croire mais, en 1975, les femmes vivaient toujours sous le coup du Code Napoléon de 1810 et de son article 317: «Quiconque provoque l'avortement d'une femme enceinte avec ou sans son consentement au moyen d'aliments, de drogue, de médicaments, par violence ou d'autres remèdes, est puni de prison.» À cette loi rétrograde du début du 19e siècle, s'ajoutait celle de 1920, votée par une assemblée d'hommes au lendemain de la boucherie de 14-18 et qui, elle, réprimait et punissait «la provocation à l'avortement et la propagande anticonceptionnelle». Ces lois n'empêchaient pas les femmes qui l'avaient décidé de mettre un terme à une grossesse qu'elles ne pouvaient ou ne voulaient assumer. Sauf qu'elles le faisaient dans la clandestinité, au mépris de leur santé, de leur fertilité future et parfois de leur vie.
Après 1968, les luttes des femmes permirent de dénoncer l'injustice et l'hypocrisie de la loi. En 1971, 343 femmes dont des femmes célèbres déclaraient publiquement dans un manifeste «Nous avons avorté». L'année suivante, 331 médecins affirmaient à leur tour «Nous avons pratiqué des avortements». Peu de temps avant, au procès de Bobigny une jeune fille qui avait avorté et sa mère qui l'y avait aidée furent acquittées. Puis des organisations tels le Planning familial et le MLAC (Mouvement pour la liberté de l'avortement et de la contraception) organisèrent publiquement des centres où étaient pratiquées des interruptions de grossesse. L'hypocrisie s'étalait au grand jour. Le 17 janvier 1975, la loi autorisant l'interruption volontaire de grossesse sous certaines conditions était enfin promulguée.
Un droit encore fragile, une loi menacée
La loi a été une avancée considérable. Mais elle n'est qu'un droit et pas une garantie. En effet, chaque année, des milliers de femmes voient le délai légal de douze semaines de grossesse s'écouler sans avoir eu accès à l'IVG. Parce qu'il faut parfois attendre trois semaines avant d'obtenir un premier rendez-vous dans un centre d'IVG. Parce que, dans le secteur privé, de nombreux centres ont fermé leurs portes, sous prétexte de non-rentabilité. Parce qu'à l'hôpital public, les services qui pratiquent des IVG sont débordés et victimes des mêmes réductions de personnel et de moyens que tous les autres services hospitaliers. Reste alors la possibilité de se rendre à l'étranger... à condition d'en avoir les moyens.
Et puis la loi reste menacée par tous les obscurantistes. Si les commandos anti-IVG ne sévissent plus à la porte des centres hospitaliers depuis qu'une loi punit le délit d'entrave à l'IVG, ils existent toujours. Ici, ils préparent leurs dévots contre la loi Veil au nom de «30 ans, ça suffit»; ailleurs ne serait-ce qu'en Irlande, au Portugal ou en Pologne, ils dictent encore leur loi.
Samedi 15 janvier, il faut être nombreux à l'occasion de l'anniversaire d'une grande avancée du droit des femmes, pour montrer notre détermination à défendre ce droit, comme notre solidarité envers toutes celles qui doivent encore lutter pour l'obtenir.