Licenciements économiques : Une loi après l'autre06/01/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/01/une1901.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Licenciements économiques : Une loi après l'autre

Le quotidien économique La Tribune a rendu publiques lundi 3 janvier les grandes lignes du nouveau contrat de travail, dit "intermédiaire", que le ministre du Travail, Borloo, a mis en chantier.

Borloo aurait confié au patron d'un cabinet d'études patronales, Communications et Stratégies, le soin d'entamer des discussions avec "les partenaires sociaux", c'est-à-dire les syndicats et le patronat, en vue de proposer ce nouveau contrat de travail "intermédiaire" dont la principale nouveauté serait de pouvoir faciliter les licenciements économiques et les rendre encore plus rapides qu'aujourd'hui.

Le projet envisagerait, en échange de la promesse du maintien de la rémunération du salarié licencié pendant douze à dix-huit mois, de rendre le licenciement économique effectif en quelques jours après le démarrage de la procédure par l'entreprise.

Le gouvernement a tenu à apporter "un démenti" après l'annonce faite par le journal La Tribune. Ce démenti est très limité: le gouvernement n'envisagerait pas de modifier la législation sur les licenciements économiques, votée le 20 décembre dernier et qui donnait satisfaction à bon nombre de revendications du patronat.

Et puis, faut-il rappeler que c'est une tactique classique pour le gouvernement de démentir officiellement le contenu d'un projet en cours de préparation pour, au bout du compte, reprendre une version à peine allégée qu'on présentera comme un progrès par rapport à la version précédente? C'est ce qui s'est fait pour les retraites, l'assurance-maladie et... justement aussi pour la dernière loi sur les licenciements économiques.

On a insisté dans la presse sur les prétendus avantages qui seraient octroyés aux salariés menacés de licenciements économiques avec cette nouvelle loi Borloo, en mettant en avant les douze mois de maintien de salaire, et en étant plus discret sur les procédures express de licenciement.

Aujourd'hui, les entreprises de plus de mille salariés peuvent donner un congé de reclassement de 4 à 9 mois, préavis inclus, aux salariés qui font partie d'un plan de licenciement économique de plus de dix personnes. C'est l'employeur qui le finance, il est seulement exempté des charges sociales classiques pour la période au-delà du préavis. Pour les entreprises entre 50 et 1000 personnes, un congé quasi identique peut dorénavant être également proposé, voire imposé par le préfet, mais cette fois le patron n'a plus à payer que le préavis, le reste est payé par le reliquat de fonds de formation non utilisé et par l'État.

Or ce qui se prépare, bien loin de servir les salariés, pourrait en réalité bénéficier surtout aux patrons. Pour le projet en cours de préparation, le ministère du Travail évoque une nouvelle piste: l'utilisation des fonds des Assedic qui pourraient faire que les patrons n'aient plus rien à payer pour la période qui suivrait le licenciement. Et comme tout le monde insiste sur le "déficit insupportable" des caisses des Assedic, cela pourrait très bien être couplé avec une remise en cause des durées et des conditions actuelles de l'indemnisation chômage. Ce qui ferait que ce serait tous les chômeurs qui, au bout du compte, payeraient cette nouvelle réforme en cours de gestation.

Et puis, pour l'avenir, le "spectre" du déficit des Assedic se maintenant, on pourrait très bien supprimer "les avantages" concédés aux salariés, pour ne garder que ceux accordés aux patrons avec les remises en cause de la loi sur les licenciements. C'est exactement ce qui s'est passé avec la loi des 35heures, dont ne subsistent vraiment aujourd'hui que les remises en cause des anciennes protections dont bénéficiaient les salariés.

Certes, rien n'est encore bouclé, mais la célérité du gouvernement a de quoi inquiéter. D'autant que les travailleurs ne peuvent assurément pas compter sur les dirigeants des confédérations syndicales, ne serait-ce que pour les avertir des dangers qui les menacent. Après avoir laissé passer sans réagir l'adoption de la dernière loi, ils ont tous donné leur accord pour s'engager dans les discussions actuelles voulues par Borloo. Pour la CGT, Bernard Thibault s'est contenté d'une réserve sur le contenu à venir.

Mais à force de trop en faire, Borloo et ses compères du gouvernement pourraient bien provoquer un vrai ras-le-bol, des travailleurs cette fois.

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