Référendum : Mon bel horizon!15/12/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/12/une1898.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Tribune de la minorité

Référendum : Mon bel horizon!

Attac, ce week-end, a été la dernière des organisations de gauche et d'extrême gauche à prendre position. Lutte Ouvrière et les Verts l'avaient fait une semaine auparavant, le PS quelques jours plus tôt, le PCF, la LCR et le PT bien avant encore.

La gauche est bien sur pied de guerre. Avant de connaître la question que Chirac va lui poser et quand il va la lui poser, elle connaît déjà la réponse: Oui pour le PS et les Verts (enfin leur majorité), Non pour les autres.

Requinquée la gauche, il n' y a pas de doute! Le gouvernement, après ses défaites aux régionales et aux européennes, a beau poursuivre aussi gaillardement ses attaques contre les travailleurs, sans rencontrer plus d'obstacle, la gauche repart enthousiaste pour une nouvelle bataille... dans les urnes.

Évidemment, une fois la décision prise de voter Oui ou Non, il fallait bien la justifier. Et il n'y a pas, dans les circonstances présentes, trente-six façons. En tout cas tous, sans exception, ont adopté la même: scruter la constitution européenne pour lui trouver des "avancées" (lesquelles? Malgré les efforts du PS ou la CFDT pour nous en convaincre, on reste un peu sur sa faim...), ou mettre en avant ses défauts. Là, il n'y avait que l'embarras du choix et chacun a donc fait le sien. LO peut déplorer l'absence d'une référence au matérialisme et à l'athéisme (s'attendait-on à la trouver? Et si elle y avait été par on ne sait quel miracle, bien qu'il soit malséant de parler de miracle ici, cela changerait-il quoi que ce soit à la Constitution?), d'autres qu'elle "grave dans le marbre" les principes du "néo-libéralisme" (on sait qu'il s'agit là d'un nom de code pour capitalisme à l'usage de ceux qui ne voudraient pas paraître comme des ennemis irréductibles de celui-ci).

Pourtant tous les autres partis du Non, de la LCR au PCF, ont d'avance souscrit à l'esprit de la déclaration faite par la porte-parole de notre organisation au Monde: "Cette Constitution ne nous semble pas changer grand-chose à ce qu'est la politique du capitalisme financier et des grands trusts européens".

Mais alors pourquoi donner tant d'importance à ce référendum? Pourquoi gonfler les conséquences de son résultat, ce qui, comme la campagne ne fait que commencer, ne peut aller qu'en s'aggravant? Quand le samedi Arlette Laguiller déclare au Monde que "un Non à la constitution donnerait une victoire morale aux travailleurs" (un Oui donnerait-il alors une défaite, alors qu'il a toutes les chances de l'emporter? Et pas seulement à cause du ralliement du PS, mais surtout parce qu'un sentiment européen bien respectable va y porter nombre de travailleurs. Et pas parmi les plus démoralisés qui, eux, voteront Non... à l'invitation de l'extrême droite, sur des bases xénophobes ou racistes), dès dimanche Jacques Nikonoff, président d'Attac, se sent obligé d'en rajouter: "Nous sommes maintenant prêts pour la mère des batailles, celle de la victoire du "non" au référendum de ce printemps".

Yves Salesse, président du club Copernic, avait déjà enchéri dans Politis: "ce référendum sera le vote le plus important depuis longtemps... plus important que les élections présidentielles et législatives à venir". Hyperbolique, et surtout un gros mensonge. Toutes ces manoeuvres et bagarres, à gauche comme à droite, n'ont rien à voir avec l'adoption ou le rejet de la Constitution mais visent justement à se placer... en vue des élections de 2007. De Villiers face à Le Pen, Sarkozy, Bayrou et Chirac (ou un de ses poulains) les uns contre les autres, Hollande (et d'autres) contre Fabius. Dans la gauche de la gauche elle-même la course au Non le plus bruyant est d'abord celle à la candidature aux présidentielles (qui aura la préséance de Buffet, Braouzec, Salesse, Nikonoff, Besancenot nous en oublions certainement, peut-être non des moindres, qu'ils nous excusent!) ou la préparation des alliances entre partis aux législatives de 2007.

Bien sûr, toute cette cuisine politicienne pourrait passer pour légitime et naturelle de la part de partis politiques, comme le fait de se prononcer dès maintenant sur le référendum (c'est leur boulot disent les braves gens goguenards et indifférents), si...

...si, ceux d'entre eux qui se veulent révolutionnaires contribuaient d'abord à défaire les illusions que les travailleurs peuvent ou plutôt pourront avoir dans le référendum et non à les créer

...et si, pour cela, ils mettaient l'accent, indépendamment de ce référendum, sur les problèmes du monde du travail (salaires, défense des services publics, conditions et temps de travail...) qui méritent bien plus qu'on fasse campagne et y consacre les efforts militants de l'année qui vient qu'une consultation électorale dont il apparaît de plus en plus que la principale fonction est de servir de diversion.

Jacques MORAND

Convergences Révolutionnaires n° 36 (novembre-décembre 2004) bimestriel publié par la Fraction
Dossier: Délocalisations, chômage et démagogie chauvine
Articles: Paix européenne et guerre impérialiste-Loi Perben et justice à la tête du client - L'hôpital public mis au régime sec - Les accords de collaboration de classe signés par la CGT à la SNCF et à La Poste - La réélection de Bush: faut-il désespérer des travailleurs américains?
Pour se procurer ce numéro, 1,5 €, ou s'abonner (1an: 9 €; de soutien: 15 €) écrire à: LO, pour la Fraction, BP 233-75865 Paris Cedex 18 ou Les Amis de Convergences, BP 128-75921 Paris Cedex 19 Sur le Net: http://www.convergencesrevolutionnaires.org

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