Marseille : "Le centre-ville pour tous !"09/12/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/12/une1897.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Marseille : "Le centre-ville pour tous !"

Samedi 27 novembre,500 personnes ont manifesté de la rue de la République à la mairie centrale sur le Vieux-Port aux cris de "Réhabilitation, oui! Expulsions, non!"

La rue de la République et les rues alentour constituent un grand ensemble d'immeubles NapoléonIII qui se sont dégradés faute d'entretien. Construit au XIXe siècle, le quartier était destiné au logement des riches armateurs et négociants marseillais. Des opérations frauduleuses de spéculation immobilière (déjà!), entraînant des faillites et le ralentissement des chantiers, dissuadèrent cette population riche de s'y installer. Les immeubles furent occupés par les travailleurs du port, les immigrations successives.

Aujourd'hui, c'est un quartier populaire mêlant personnes âgées qui bénéficient de "loyers 1948", Français et immigrés de toutes origines. Des familles nombreuses trouvent dans ces immeubles de grands appartements. Les loyers sont au prix du logement social.

Avec le projet Euroméditerranée et la flambée de l'immobilier à Marseille, la réhabilitation de l'ensemble offre la perspective de profits juteux aux deux grandes sociétés immobilières qui se partagent 80% de la rue. La société Eurazéo qui appartient au groupe financier Lazard et Marseille République, filiale d'un fonds de pension américain Lone Star. Pour les habitants les travaux minimum d'entretien n'ont pas été réalisés alors que loyers et charges étaient bien encaissés, ainsi que les subventions publiques des différentes collectivités locales versées à la société immobilière P2CI pour la réhabilitation!

Depuis des années, tout est laissé à l'abandon pour pousser les actuels locataires à partir d'eux-mêmes: les ascenseurs ne sont plus réparés, les parties communes ne sont plus entretenues, les appartements sont murés dès le départ de leurs habitants. Du coup près de 800 logements sont vacants sur 1400, mais les 600 familles qui continuent d'habiter là n'ont pas du tout l'intention d'aller loger ailleurs. Elles ont entretenu leur logement, et elles y tiennent ainsi qu'à leur quartier. D'ailleurs il leur faudrait attendre des années pour obtenir un logement social.

À partir d'août 2004, des familles ont reçu un avis de non-renouvellement de bail, les autres subissent des pressions de toute sorte de la part de "médiateurs" embauchés par le groupe Marseille République pour leur faire quitter le quartier. Les intimidations alternent avec les propositions faussement alléchantes "d'aides au déménagement". Mais aucune proposition de relogement n'est faite.

Les commerçants sont également touchés. Les baux commerciaux ne sont pas renouvelés, et les petits commerces de quartier qui restent encore se sentent condamnés à fermer à plus ou moins longue échéance.

Les habitants ont décidé de s'organiser pour ne pas faire les frais de la réhabilitation. Ils réclament que les habitants actuels soient relogés sur place, y compris pendant la durée des travaux. Le nombre de logements vacants permettrait largement de les reloger provisoirement. Ils réclament aussi que les loyers leur restent accessibles après la rénovation sinon, au marché libre actuel de Marseille, ils doubleraient! Ils ont payé loyers et charges depuis des dizaines d'années pour certains, ce serait bien la moindre des choses qu'on ne leur fasse pas payer en plus une rénovation qui aurait dû commencer depuis longtemps!

La manifestation du 27 novembre a entraîné dans la rue les vieux habitants du quartier, les familles, les commerçants. Des gens qui manifestaient pour la première fois de leur vie ont dit que ce ne serait pas la dernière...

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