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Chirac en Libye : "Les affaires sont les affaires"
Le 24 novembre, Chirac a repris sa valise de représentant de commerce et s'est rendu en Libye rencontrer Mouammar Kadhafi. C'était une première pour un chef d'État français.
Mais Chirac était là pour affaires. D'autres dirigeants européens, anglais, belges, espagnols et italiens, l'ont déjà précédé à Tripoli, venus eux aussi proposer les services de leurs entreprises. Maintenant que les sanctions économiques contre la Libye ont disparu, et avec l'augmentation du prix du pétrole, la Libye attire les convoitises. Les grandes entreprises françaises aimeraient pouvoir augmenter leur présence en Libye, dont elles n'assurent que 6% des importations. Chirac l'a dit sans fard: "Le moment est venu de redonner à la France les moyens de tenir sa place et son rang en Libye, de répondre aux attentes de nos partenaires et à vos propres attentes".
Les "partenaires" évoqués par Chirac l'avaient d'ailleurs accompagné. Il était flanqué d'une brochette de patrons de différents secteurs d'activités: énergie, infrastructures, télécommunications, transports, eau et environnement.
Total entendait élargir ses activités dans le secteur pétrolier (il aimerait doubler sa production locale d'ici cinq ans). Airbus espérait damer le pion à Boeing au moment où la Libye va renouveler sa flotte aérienne. Thales venait vendre des radars et de la surveillance côtière (notamment pour arraisonner les barques d'émigrants) et Lafarge du ciment (ce secteur est désormais privatisé en Libye). Enfin, maintenant que l'embargo sur les ventes d'armes à destination de la Libye est levé, Dassault aimerait bien lui placer des Mirage, et assurer la maintenance de ceux vendus il y a trente ans. Kadhafi, lui, a manifesté son désir de se doter en nucléaire civil, ce qui ferait bien les affaires d'EDF.
Même si le groupe Vinci a signé pour l'occasion un accord de coopération avec une entreprise libyenne dans le cadre des travaux d'irrigation de ce qu'il est convenu d'appeler "la Grande Rivière artificielle", il n'est pas sûr que les ambitions des groupes capitalistes français puissent être satisfaites. En effet, maintenant que la Libye est rentrée en grâce auprès de Washington, les grands groupes nord-américains ont bien l'intention de s'y tailler la part du lion. Et comme, du côté des dirigeants libyens, les déclarations antiaméricaines ont été mises en sourdine, ils ont toutes leurs chances.