- Accueil
- Lutte ouvrière n°1889
- Île de La Réunion : Le chômage et les as du baratin
Leur société
Île de La Réunion : Le chômage et les as du baratin
Quelle stratégie pour l'emploi à La Réunion d'ici à 2030? Tel est le sujet sur lequel se sont penchés les présidents des conseils général et régional, ainsi que le préfet et les "acteurs économiques", c'est-à-dire essentiellement les patrons de La Réunion et leurs proches.
Les projections concernant la population annoncent un million d'habitants en 2030 et cent mille personnes de plus en âge de travailler. Voilà qui donne des sueurs froides à tous ceux qui sont responsables de la détresse des cent mille chômeurs actuels. Combien seront-ils demain et comment faire en sorte que ça ne leur explose pas à la figure?
Jusqu'à maintenant, s'il n'y a pas eu d'explosion sociale, l'existence du RMI, les allocations chômage y sont sans doute pour quelque chose. Seulement, aujourd'hui, le grand patronat estime que tout ce dispositif coûte encore trop cher. Moins d'État pour les pauvres, moins d'aides pour les chômeurs, voilà ce que réclame Seillière. Il faut laisser agir la concurrence, ne laisser vivre que les affaires qui rapportent des profits rapides et en constante augmentation, même dans le secteur public. À tous ces patrons, il faut des travailleurs payés au lance-pierres, acceptant la flexibilité des horaires, sans salaire minimum, sans protection contre les licenciements, sans convention ni garanties collectives.
Sous prétexte d'aider les patrons à embaucher, la gauche les avait arrosés de subventions, via la loi d'orientation pour l'outre-mer. En revenant au gouvernement, la droite a essayé de faire plus, en étendant les exonérations de charges patronales à tous les secteurs d'activité, en faisant, entre autres, sauter le verrou des cinquante salariés maximum au-delà desquels les subventions n'étaient plus versées ou seulement partiellement versées.
En sens contraire, le retour de la droite s'est traduit par une diminution de la contribution de l'État aux emplois aidés, surtout ceux travaillant dans le secteur public (éducation nationale, santé, communes, associations). Le nouveau préfet s'est d'ailleurs félicité de la diminution de 5% en 2004 des crédits affectés aux CES (les Contrats emploi-solidarité offrant un travail dans des activités d'intérêt général). Il a même souhaité que "cette baisse soit encore plus forte en 2005". Le résultat est que des centaines de jeunes, des femmes en particulier, n'ont pas vu leur contrat prolongé et se retrouvent aujourd'hui à nouveau au chômage.
En plus de tout cela, la nouvelle convention chômage signée entre le Medef d'une part et la CFDT, la CFTC et la CGC d'autre part, a entraîné une baisse moyenne d'indemnisation de six mois pour les chômeurs. Des centaines d'entre eux se sont retrouvés exclus du droit aux Assedic. Et aujourd'hui la préfecture ose nous annoncer une baisse de 10,5% des chômeurs à La Réunion... du simple fait que l'État les a fait rayer des listes Assedic!
Après avoir poussé des centaines, voire des milliers, de nouveaux travailleurs vers la misère, on nous annonce à présent une campagne de "lutte contre le travail au noir". Leur cynisme n'a pas de limite, et celui-ci étant frère du culot, voilà maintenant que nos bonnes âmes de la préfecture, des conseils général et régional disent vouloir "augmenter de 20% en trois ans le nombre des emplois marchands"!
Mais à l'heure où les patrons font la chasse aux emplois permanents pour les remplacer par des emplois précaires, où la sous-traitance s'étend, qui peut bien les croire?
Leurs mensonges ne nous ont jamais fait rêver.