Vallourec-Laigneville (Oise) : Des reculs imposés de haute lutte07/10/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/10/une1888.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Vallourec-Laigneville (Oise) : Des reculs imposés de haute lutte

Vendredi 1er octobre, plusieurs dizaines de salariés de l'usine Vallourec à Laigneville (Oise) étaient rassemblés, à l'initiative du syndicat CGT, pour faire le point sur l'accord qu'ils avaient arraché et tirer le bilan de plus de huit mois de conflit, après l'annonce de la fermeture de l'usine qui comptait 117 travailleurs.

Voici l'essentiel de ce qui a été gagné et inclus dans un accord, après bien des retours en arrière et de multiples manifestations. Tout d'abord une période payée de sept mois de reclassement avant le licenciement effectif, qui bénéficiera à la grande majorité du personnel qui refuse d'être mutée à des centaines de kilomètres de là. Une prime uniforme de 30000 euros sera versée à ces derniers, quelle que soit leur ancienneté, en plus des indemnités légales. Du coup, personne ne touchera au total moins de 35000 euros, et près de 45000 euros (soit 300000 francs) pour la majorité.

Aux plus anciens, ceux qui ont cinquante-quatre ans et deux mois, la direction s'est engagée dans l'accord à garantir le paiement de 57% de leur salaire brut, une fois terminées les indemnités de chômage, et cela jusqu'à leur départ effectif en retraite, qui sera à 65 ans pour bon nombre d'entre eux.

Quant aux mesures de reclassement, personne n'y croit vraiment. Cela fait partie du rituel obligatoire. Cela dit, la direction a été obligée d'inclure un engagement formel de proposer à chaque salarié un contrat de travail en CDI dont la conclusion ne dépende que de l'acceptation du salarié. Ce qui permettra, dans le cas probable de non-réalisation, à ceux qui le souhaiteraient de demander éventuellement des comptes à la direction devant les tribunaux.

Cette lutte a été difficile. Car les salariés, à 117, ont eu à affronter un groupe puissant, contrôlé par Bolloré, une des premières fortunes du pays, qui avait la volonté de faire plier la résistance de ses salariés. Le groupe a bénéficié de l'appui sans faille de tous les rouages de l'État. Certains, parmi les forces de police, ont avoué aux militants que la direction générale donnait ses instructions directement au préfet et même au-dessus de lui. C'est ainsi qu'on a pu voir les CRS organiser les réunions de Comité central d'entreprise, le directeur départemental du travail surpris en train de manigancer avec la direction générale. Quant au cabinet du ministre du Travail, Borloo, il a écrit récemment au syndicat et au CE qu'il couvrait tout ce qui avait été fait.

Et, comme souvent dans les luttes difficiles, les travailleurs ont eu à se battre à plusieurs reprises pour obtenir dans les faits ce qui leur avait déjà été concédé. La majorité des 117 sont restés mobilisés jusqu'au bout et c'est ce qui leur a permis d'imposer des reculs.

Et puis les travailleurs de Vallourec ont été dans les autres usines du groupe, au siège de Vallourec et du groupe Bolloré, là où leurs patrons continuaient à faire de juteux profits, pour s'adresser aux autres salariés et montrer à la direction qu'ils n'en finiraient pas comme ça avec eux. C'est ce radicalisme qui a amené les patrons de Vallourec à composer. Mais c'est ce radicalisme qui a déplu aux responsables CGT du département et de la région, qui non seulement n'ont organisé aucune action de solidarité vis-à-vis des travailleurs de Vallourec en lutte, mais ont eu le culot de venir à l'usine faire des reproches aux responsables du syndicat CGT, en leur demandant de se montrer plus modérés. Le maire PCF de Montataire, qui se trouve à côté de Laigneville, a polémiqué dans la presse contre les actions des salariés de Vallourec, qui, disait-il, "comme celles de Chausson", n'aboutiront qu'à des échecs.

En tous les cas, les salariés de Vallourec et les militants, tout en étant conscients des limites de ce qu'ils ont obtenu, sont fiers d'avoir relevé le gant et de s'être battus jusqu'au bout. Comme cela a été dit au cours du rassemblement de ce 1er octobre, chacun a pu se rendre compte, au travers de la lutte, de la force qu'auraient les travailleurs si, au lieu de se battre isolément le dos au mur, ils se battaient tous ensemble contre les attaques patronales.

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