«Service minimum» et «alarme sociale» : L’imagination du gouvernement contre les grèves29/09/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/10/une1887.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

«Service minimum» et «alarme sociale» : L’imagination du gouvernement contre les grèves

Le gouvernement n'a pas abandonné son projet de loi sur ce qu'il appelle le «service minimum» (ou le «service garanti») devant assurer la «continuité du service public» dans les transports en commun terrestres (publics ou privés) en cas de grève annoncée.

Il s'agit d'un véritable projet antigrève, ressenti comme tel par les cheminots en particulier, et qui contient des dispositions insensées comme par exemple l'instauration d'une «déclaration individuelle de grève 48 heures à l'avance» pour les travailleurs ayant l'intention de répondre à un appel syndical. Cela est apparu si gros que le président de la SNCF, Louis Gallois, a incité le gouvernement à plus de prudence, déclarant en substance qu'une loi c'était bien joli, mais que pour éviter les conflits mieux valait une bonne négociation avec les syndicats de l'entreprise...

«L'alarme sociale»à la RATP

À propos du service minimum, le dispositif en vigueur à la RATP dit «d'alarme sociale» est donné en exemple. De quoi s'agit-il?

Le système (précisé dans un texte du 23 octobre 2001) consiste d'abord dans l'envoi d'un courrier à la direction, par un ou plusieurs syndicats, indiquant «le motif susceptible de devenir conflictuel». La direction est ensuite tenue de recevoir le ou les syndicats dans les cinq jours à partir de la réception de la lettre. Au sortir de la réunion, un constat doit être publié, soit d'accord, soit de désaccord. S'il y a désaccord, les syndicats qui suivent cette procédure peuvent alors déposer un préavis de grève, cinq jours pleins avant le début prévu de celle-ci. L'alarme sociale allonge donc les délais avant la grève jusqu'à onze jours, ce qui est censé permettre à la direction de négocier et d'éviter les grèves.

Cette procédure n'a pas été signée par l'ensemble des syndicats. La CGT-bus, la CGT-métro et l'UGICT qui n'ont pas signé le protocole ne passent pas par l'alarme sociale avant de déposer leurs préavis de grève.

Mais plus qu'à la procédure de l'alarme sociale, la baisse du nombre de préavis de grèves à la RATP est due à l'esprit de conciliation, pour ne pas dire de modération, des syndicats. En fait, la concertation direction-syndicats est quasi permanente. De ce fait, la CGT elle-même a cessé depuis plusieurs années d'appeler à des journées d'action. Malgré cela, il y a tout de même des préavis de grève. Mais ce sont des préavis «locaux», contre des sanctions, contre des dégradations du service et de mauvaises conditions de travail dues au manque d'effectifs. Des débrayages sans préavis éclatent aussi sur certaines lignes, suite à des bus manquants, à une sanction ou à une agression. Dans ce cas, la direction considère souvent les grévistes en absence illégale, passible de sanctions.

Le gouvernement souhaiterait faire une loi qui s'inspire du système en vigueur à la RATP. En entravant l'exercice du droit de grève, il espère décourager par avance les travailleurs qui voudraient se mettre en grève. Mais il risque d'obtenir le résultat inverse et de provoquer une grève contre ses projets. De toute façon, on l'a vu lors de la lutte contre la réforme du système des retraites au printemps 2003: l'alarme sociale n'a pas empêché bien des travailleurs du métro et des bus de se joindre au mouvement des enseignants et de la fonction publique. Lorsque les travailleurs sont vraiment mobilisés, les dispositions légales antigrèves s'avèrent inefficaces. Même le président de la SNCF a l'air de le savoir.

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