Clonage thérapeutique : Les avancées scientifiques face aux vieilleries obscurantistes02/09/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/09/une1883.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Clonage thérapeutique : Les avancées scientifiques face aux vieilleries obscurantistes

En Grande-Bretagne, une équipe de biologistes a été autorisée à fabriquer des embryons humains par "clonage" afin de mener des recherches sur le traitement de maladies et notamment du diabète. C'est ce qu'on appelle le "clonage" thérapeutique. Le mot inquiète, provoque les mêmes émois que les oeuvres de science-fiction.

Concrètement, il s'agit d'essayer de fabriquer un "embryon" humain selon la même technique que celle qui avait conduit, en 1997, à la naissance de Dolly, la brebis clonée. Il s'agit pour cela de prélever une cellule sur un individu (ici, par exemple, un diabétique) et d'implanter le noyau de cette cellule dans un ovule préalablement vidé du sien. La technique est difficile. Il faut des centaines d'essais pour une réussite. Quoi qu'il en soit, si l'implantation réussit, la cellule se divise en deux, puis en quatre, en huit, seize, etc. Exactement comme le fait la cellule issue de la fécondation d'un ovule par un spermatozoïde. Et c'est cela le fameux "embryon" dont on parle: un amas microscopique de quelques dizaines de cellules mais certainement pas un foetus ni un bébé en miniature.

L'intérêt de la technique? Il y en a au moins deux. D'abord, l'embryon a exactement le même patrimoine génétique que l'individu (ici le diabétique) à qui on a prélevé la cellule initiale, c'est son clone. Ensuite, dans ce petit amas cellulaire, les cellules sont encore "indifférenciées", c'est-à-dire qu'elles peuvent se développer en n'importe quel type cellulaire. Ce sont des "cellules souches embryonnaires", elles peuvent donner des cellules nerveuses, des cellules osseuses, des cellules de peau, etc., selon le milieu dans lequel on les fait se développer.

D'où l'idée, pour l'équipe de chercheurs anglais, de tenter d'obtenir ainsi des cellules de pancréas, celles qui fabriquent l'insuline (la substance qui manque aux diabétiques), et de les greffer au malade sans risque de rejet puisque, provenant de son clone, elles ont exactement le même patrimoine génétique que lui.

On n'en est pas encore là. Les chercheurs estiment qu'il leur faudra au moins quatre ou cinq ans avant de pouvoir greffer de telles cellules à des malades, si même cela est possible. Mais si cela l'était, ce serait une véritable avancée par rapport aux traitements actuels du diabète.

À l'annonce de cette autorisation donnée à l'équipe de chercheurs britanniques, les représentants de l'Église se sont offusqués. "C'est un danger très très grave pour l'avenir de l'humanité. (...) La création d'embryons, que ce soit par rencontre de cellules sexuelles ou par clonage, risque totalement de mettre l'embryon humain au rang de chose". Mais qu'est-ce donc qu'un amas de quelques dizaines de cellules dans un tube à essais si ce n'est une chose? Rien n'y est formé, ni la tête ni les membres ni le coeur ni le foie ni le cerveau... Où se situe donc "l'âme" des embryons si chère aux calotins?

Des politiques aussi sont montés au créneau. Un représentant de l'UMP a regretté qu'une nouvelle étape soit franchie dans "la transgression des règles de respect de l'embryon humain". À se demander s'ils savent même de quoi ils parlent.

Et puis, la position de ces politiques est pour le moins "faux-cul". Ainsi, en France, s'il est interdit aux scientifiques de travailler sur les embryons humains issus de la technique de transfert de noyau, ils peuvent le faire sur les embryons issus de fécondation in vitro, c'est-à-dire sur le même type d'amas cellulaires mais... provenant de la fécondation d'un ovule par un spermatozoïde.

Et voilà comment, d'un côté, cela leur permet de ne pas froisser les bigots de leur électorat et, de l'autre, de ne pas risquer de léser les intérêts des grandes compagnies du médicament si, demain, des avancées thérapeutiques voient le jour.

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