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Leur société
Sarkozy et la baisse des prix : De la démagogie sans effet
Constatant, dit-il, un «tassement du pouvoir d'achat des Français», (tiens donc!), Nicolas Sarkozy, désormais ministre de l'Économie, a présenté une parade.
Il a réuni les industriels qui fournissent les supermarchés et les grands distributeurs et leur a demandé de faire baisser les prix des produits des grandes marques de 3% d'ici à septembre 2004, et de 2% supplémentaires en 2005, l'effort devant être également réparti entre fournisseurs et distributeurs. Il leur a laissé jusqu'au 17 juin pour arriver à ce résultat, en leur demandant de rogner sur ce qu'on appelle les «marges arrière». Sinon, a-t--il menacé, il prendra des mesures, en se gardant bien de préciser lesquelles!
Depuis la loi Galland de 1996, destinée, prétendait son promoteur, à protéger le petit commerce, les industriels sont obligés de vendre leurs produits au même prix quel que soit leur client. Mais cette loi, qui leur interdit de faire des ristournes aux grandes surfaces, a été aisément contournée grâce audit système des «marges arrière»; les hypermarchés ne bénéficient pas de prix de faveur mais, en contrepartie, ils facturent aux industriels auprès desquels ils se fournissent toute une série de services, tels que la promotion publicitaire de leurs produits, une mise en valeur aux têtes de gondoles, une animation des étalages, etc. Bien entendu, en bout de chaîne, c'est le consommateur qui paie ces petits cadeaux aux industriels.
Officiellement, la hausse des prix des produits vendus par les supermarchés est de 2,3% par an depuis 1997, alors que l'inflation générale, toujours selon les chiffres officiels, n'est que de 1,5% l'an en moyenne. Mais les prix de certains produits, tels les aliments pour bébé ou les cosmétiques, ont grimpé en flèche. Ces statistiques ne font d'ailleurs que confirmer ce que chaque ménagère constate en faisant ses courses: on paie de plus en plus cher pour remplir son caddie.
Les hypermarchés vont-ils baisser leurs prix, comme dit le vouloir Sarkozy? Il n'est pas improbable qu'ils accèdent à ses demandes, ou qu'ils trouvent un moyen de faire semblant. Le fait est qu'étant de plus en plus chers, ils voient leur clientèle baisser, au profit des enseignes de «hard discount», telles que Ed, Leader Price ou Lidl. Du moins est-ce ainsi qu'argumente la presse économique. Mais, dans les faits, la plupart sinon toutes ces enseignes sont des filiales des grands distributeurs; par exemple, Leader Price appartient au groupe Casino et Ed à Carrefour. Petit cadeau supplémentaire du gouvernement, si les distributeurs acceptent d'ouvrir des rayonnages pour y vendre des marques moins connues, ils auraient en contrepartie l'autorisation de s'agrandir. Et de toutes façons, rien n'empêchera les industriels ou les distributeurs, une fois l'obligation de baisse des prix passée, qu'ils pourront transformer en opération promotionnelle, de faire grimper leurs prix, en introduisant un changement minime dans la composition ou la présentation du produit, par exemple.
Pour la majorité des travailleurs, des chômeurs, des retraités qui arrivent de moins en moins à boucler leurs fins de mois, cette baisse de 3%, intervenant dans quelques enseignes de la distribution ne changera malheureusement pas grand-chose à leur niveau de vie. C'est une mesure démagogique, qui n'écornera même pas les superbénéfices des gros distributeurs ou industriels. Pour éviter le «tassement de leur pouvoir d'achat», il faudrait une réelle augmentation des salaires, des pensions, et une baisse du chômage. Mais cela, il ne faut pas l'attendre d'un Sarkozy ni de ses effets d'annonce.