Après les régionales : Ils parlent de réformes pour envoyer les salariés au rebut01/04/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/04/une1861.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Après les régionales : Ils parlent de réformes pour envoyer les salariés au rebut

"Imposer à toute force les "réformes" que le pays attend", "lutter contre les immobilismes, voire même contre les égoïsmes et les corporatismes de qui s'accrochent à des privilèges, tels les cheminots, les enseignants, les fonctionnaires", telle est l'image que veulent se donner le gouvernement Chirac-Raffarin et la majorité de droite. Cela leur sert d'ailleurs d'argument quasi unique pour expliquer leur défaite lors des récentes élections régionales, vaincus, prétendent-ils, par la coalition de tous ceux qui se refusent aux transformations, à la modernisation de la société, dont ils seraient les champions.

Sur le ton du rebouteux qui explique qu'il n'a d'autre choix que de vous couper la jambe pour vous éviter le pire, ils prétendent que la réforme des retraites, par exemple, est arrivée à temps pour éviter la faillite.... du système de retraites. Celle de la Sécurité sociale serait inévitable et urgente, pour les mêmes raisons. Le pire est que ce discours nous vient de tous bords. Du côté de cette droite, bien évidement, mais aussi du coté des dirigeants de la gauche parlementaire, ou des directions syndicales. Tous admettent qu'il fallait "réformer" la retraite, et qu'il faudra en faire autant avec la Sécu, car, disent-ils, la société évolue, la durée de vie augmente, et autres arguments statistiques et démographiques tendancieux.

L'opinion est ainsi soumise à un véritable matraquage qui vise à faire croire qu'il n'y aurait pas d'autre choix possible, et que ceux qui s'y opposent seraient des myopes responsables des pires catastrophes à terme, par inertie et manque de courage politique. Les mots utilisés dans cette campagne de conditionnement des esprits, qui préparent les prochaines attaques gouvernementales, ne sont pas innocents. On nous parle de réforme pour faire croire qu'il s'agit d'un progrès ou du moins d'un moindre mal, alors qu'il s'agit d'une régression programmée et qui n'a guère connu de précédents de cette ampleur dans le passé, visant une catégorie, la plus nombreuse et la plus pauvre, de la population. On voudrait nous faire accepter de subir une situation où vieillir, pour un salarié, sera synonyme d'appauvrissement, puis de misère. Et qu'il en sera de même pour ceux qui tomberaient malades.

Il faut refuser ce piège que les politiciens, les experts et les manipulateurs d'opinion de tous bords veulent nous tendre. Le progrès, c'est quand la société dans son ensemble peut accéder aux moyens qui permettent d'améliorer la vie de chacun, quel que soit son âge, sa situation de santé, ses compétences et son métier. Cela n'est pas possible, disent les porte-parole des nantis, les hommes politiques, les spécialistes en statistiques de toute sorte, ces cartomanciens qui prétendent lire l'avenir de la société. Ils nous disent que "la France n'a pas les moyens" et que de toute façon la couverture sociale serait trop petite pour couvrir les besoins de tous. Mais alors il faudrait qu'ils expliquent pourquoi, la productivité ayant décuplé rien que dans les dernières années du 20ème siécle, on ne pourrait pas financer les moyens de vivre sa vieillesse dans des conditions satisfaisantes, même si l'on vit, en moyenne, plus vieux. Il faudrait expliquer aussi pourquoi, tandis que les progrès scientifiques et techniques dans le domaine de la médecine permettent d'affronter de plus en plus efficacement les atteintes à la santé, l'accès aux soins est de plus en plus restreint pour toute une catégorie de la population.

En admettant même que la richesse ne soit pas suffisante pour satisfaire les besoins essentiels de tous, ce qui est une contre-vérité, si vraiment la couverture était trop petite, pourquoi ne pas prendre aux plus riches, ceux qui accumulent les richesses, pour satisfaire les besoins du plus grand nombre?

Ceux qui disent qu'il n'y aurait pas d'autre choix que de réduire la part réservée aux salariés oublient cette alternative-là. Mais est-ce vraiment un oubli? C'est plutôt un choix social. En changer, ce serait bien la seule "réforme" qui serait vraiment un progrès. Mais cela supposerait de s'attaquer aux vrais privilégiés, ceux de l'argent, aux vrais conservateurs, ceux qui veulent conserver et accroître leur fortune au détriment d'une population qu'ils appauvrissent, au véritable égoïsme dominant, celui des capitalistes.

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