Magasins Gifi d'Ile-de-France : La grève continue05/03/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/03/une1857.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Magasins Gifi d'Ile-de-France : La grève continue

A son onzième jour, mardi 2 mars, la grève continuait pour 150 salariés et responsables de onze bazars Gifi en région parisienne, malgré les intimidations des hommes de main du patron qui ont tenté de forcer le rideau de fer d'un magasin avec une perceuse. La grève s'était déclenchée pour le paiement des heures supplémentaires accumulées, et contre la sanction frappant le chef de secteur pour l'Ile-de-France qui avait dénoncé la situation.

Chaque magasin compte moins de 20 salariés et le patron, Philippe Ginestet, avait tenté d'en jouer pour considérer qu'il s'agit de sociétés indépendantes -il en possède plus de 200 sur toute la France-, certains responsables n'étant officiellement pas salariés mais mandataires du patron. Celui-ci a été présenté à la télévision comme l'un de ces hommes partis de rien, à qui la fortune sourit et qui, pour que cela se sache, débarque en hélicoptère apporter des cadeaux aux enfants du personnel.

A partir d'un simple magasin à Villeneuve-sur-Lot, ce fils de marchand de bestiaux, familier des foires, a construit "sa" société qui, à force d'essaimer des "solderies" installées dans les "zones d'activité", pèse aujourd'hui 336 millions d'euros de chiffre d'affaires. En 1996, il avait cédé une partie de son capital, notamment à des fonds de pension, obtenant ainsi de l'argent frais qui lui permit de racheter un peu plus tard son concurrent Foir'Fouille. La consécration est venue en 2000 avec l'entrée en Bourse de Gifi. Encore récemment, la presse financière a vanté les résultats de ce "spécialiste de la distribution non alimentaire à premier prix": l'année dernière, son bénéfice a atteint 25,5 millions d'euros, en augmentation de 42% par rapport à l'année précédente, et l'ouverture de 24 nouveaux magasins est prévue pour cette année.

Cette "réussite" est basée sur une exploitation de salariés payés au smic, et des heures supplémentaires à la pelle, en particulier pour les responsables de magasins qui font des semaines de 53 heures! Le patron refusait jusqu'à présent de rémunérer les heures supplémentaires comme telles, si bien que la dette envers les salariés s'est accumulée en 2002, puis en 2003... et le mécontentement aussi. Quand le responsable de l'Ile-de-France a voulu, dans une lettre au patron, demander une régularisation des 35 heures pour l'ensemble des salariés pour 2002, celle des cadres sur 2002-2003 ainsi que le paiement des jours fériés pour la totalité des salariés, la réponse fut une "mise à pied conservatoire" en vue d'un licenciement, prétendument pour faute lourde.

Dans un climat où les patrons se croient tout permis, Philippe Ginestet ("Gifi") n'avait pas prévu, ni le courage d'un de ses responsables alors qu'il croyait l'encadrement à sa botte, ni que les salariés rompent avec l'isolement d'une boutique à l'autre: en grève, ils ont organisé des rassemblements tournants entre différents magasins. Une publicité disait "Gifi, une idée de génie", mais ce n'était certainement pas à cela que pensait le patron, qui s'est d'ailleurs déclaré "très surpris de cette réaction spectaculaire". Le syndicat CGT, qui existait déjà avant la grève, s'en est trouvé renforcé. Le moral des travailleurs, toutes origines et nationalités réunies, également.

Face à un mouvement qui fait mal à son chiffre d'affaires, le patron a dû reculer sur le paiement des heures supplémentaires, et une négociation est prévue au sujet du responsable d'Ile-de-France. Mais pour le moment Gifi voudrait faire rattraper les heures de grève, ce que les salariés refusent.

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