La marche de "Ni putes ni soumises" à Nice, Marseille et Rouen26/02/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/02/une1856.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

La marche de "Ni putes ni soumises" à Nice, Marseille et Rouen

Poursuivant leur marche, les militantes de Ni putes ni soumises ont organisé des réunions à Nice et à Marseille.

Mercredi 18 février à la Bourse du Travail à Nice, avec 120 personnes, la salle était comble. À la tribune, Guy Bedos exprimait son soutien au combat de Fadela Amara et de ses amis. Celle-ci rappelait les raisons de leur combat et leurs objectifs, puis donna la parole à la salle. Contrairement aux autres villes, aucune femme voilée n'était venue à ce débat.

À un militant du PS, qui se présentait comme un "citoyen" et qui lui reprochait de ne pas reconnaître que c'était la droite qui coupait tous les crédits à l'éducation en milieu défavorisé alors que Lionel Jospin avait pris des mesures pour les ZEP, Guy Bedos répondit qu'il avait suffisamment roulé pour le PS pour oser dire qu'en matière d'éducation et d'intégration, il avait été minable.

Un enseignant dénonçant "la démission des parents dans certaines familles", Fadela Amara s'insurgeait. Les parents, expliqua-t-elle, font ce qu'ils peuvent. Pour accéder à la culture, il faut des moyens financiers. Évidemment l'argent des allocations familiales ne va pas toujours à l'éducation des enfants puisqu'il est souvent le seul argent pour acheter la nourriture. Que les politiciens qui parlent de supprimer les allocations familiales aux parents de jeunes délinquants ou d'élèves absents aillent donc vivre dans les cités avec de telles sommes!

Dimanche 22 février, le débat reprenait, à Marseille cette fois, en compagnie d'une rédactrice du magazine Elle dans la salle du théâtre Toursky devant près de 400 personnes animées d'opinions fort différentes les unes des autres et qui les exprimaient avec chaleur.

Les femmes voilées présentes étaient moins d'une dizaine, mais trois ou quatre groupes de 4 ou 5 personnes s'étaient réparties dans la salle, prodiguant à grand bruit huées et applaudissements pour défendre leurs conceptions sur la subordination des femmes dans la société. L'essentiel de leur argumentation, défendue par des étudiantes - voilées - de faculté, était qu'il fallait respecter leur liberté de conscience, leur droit de parler. Quelques hommes se sont dits soucieux de respecter les femmes attachées à leur culture et à leurs traditions: en quoi le port du voile serait-il un droit moins universel que celui de ne pas le porter?

Une jeune fille habitant sans doute un quartier pauvre, affirmait que si elle s'habillait en survêtement c'était par choix et qu'il était ridicule de dire qu'une fille ne pouvait pas sans cela sortir dans la cité. En quoi elle fut contredite énergiquement par une autre jeune fille qui s'étonnait d'ailleurs d'être la première à affirmer clairement son athéisme: le soir il n'y a que des garçons dans la cité, si on sort on se fait "traiter", protesta-t-elle.

Une avocate algérienne émut la salle en rappelant la violence des intégristes en Algérie. La religion doit rester un choix personnel, on ne veut pas de parti religieux, de "parti musulman", dit-elle. Quelqu'un rappela qu'en France c'était la police qui, après 1905, retirait les crucifix des écoles. À plusieurs reprises il fut réaffirmé que les femmes n'avaient pas à être cachées, qu'elles étaient les égales des hommes et non leur complément.

La rédactrice de Elle rétorquait à ceux qui voulaient expliquer les viols par l'exposition dans la rue de photos de femmes nues, que l'on n'avait jamais vu d'hommes se faire violer par des groupes de femmes. Quelqu'un lançait à l'adresse des jeunes hommes que si c'était ça la liberté, ils n'avaient qu'à le porter, eux, le voile.

Des homosexuels sont intervenus pour dire les brutalités dont ils sont victimes, eux aussi, dans les quartiers pauvres et les cités.

Enfin Fadela Amara insista sur le fait que la discrimination et l'exclusion touchaient les pauvres et qu'il fallait combattre le chômage et la misère, que les enfants s'appellent Benoît ou Mohammed. Et que, derrière le voile, le grand problème était le manque de travail et la pauvreté qui en découle.

À Rouen

Lundi 23 février, le tour de France de Ni putes ni soumises faisait étape dans l'agglomération de Rouen à Grand-Quevilly, la commune dont le maire est Fabius, mais cela n'enlève rien aux méfaits de la politique qu'il a menée pendant des années, qui profitant de l'occasion pour redorer son blason avait prêté la salle et même pris place à la tribune.

Plus de 250 personnes assistaient à la réunion, pour la plupart des femmes issues des mouvements féministes, mais aussi des jeunes femmes des banlieues.

Fadela Amara dénonça la situation des filles et des femmes des quartiers où "le dénominateur commun aux personnes de toutes origines est devenu la pauvreté". Quelques jeunes femmes de la ZUP de Rouen exprimèrent leur révolte. "On ne nous donne pas la parole", et "la seule possibilité pour les femmes, c'est l'école et l'indépendance financière", affirma l'une d'elles. Une autre dénonça "la réhabilitation des quartiers de centre ville, alors que les hauts de Rouen c'est pour les Noirs, les Arabes, les chômeurs". Elle expliqua que lorsqu'elle dit qu'elle habite ce quartier, "les portes se ferment".

Notre camarade Gisèle Lapeyre, conseillère régionale de Haute-Normandie, intervint pour apporter son soutien aux "femmes qui refusent de s'incliner".

Fadela appelle à se retrouver tous à la manifestation du 6 mars à Paris.

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