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- Lutte ouvrière n°1856
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Editorial
Il faut supprimer le secret des affaires !
La compagnie Air Littoral vient d'être ajoutée à la longue liste des entreprises qui ferment. Elle jette à la porte tout son personnel, des ouvriers aux pilotes, en passant par les hôtesses de l'air. Du ministère des Transports au Conseil régional de Languedoc-Roussillon et au dernier en date des prétendus repreneurs, tout ce beau monde a lanterné les travailleurs de l'entreprise jusqu'au dernier moment, pour finir par leur annoncer brutalement la nouvelle.
Mais, bien avant que l'entreprise ferme, ses actions sont passées de main en main, des sociétés d'aviation mais aussi des affairistes financiers détenant successivement la majorité des actions. Et l'on peut supposer que tous ceux qui ont acheté puis revendu des actions d'Air Littoral se sont sucrés au passage. Mais on ne peut que le supposer car toutes ces manipulations financières ont été couvertes par le secret des affaires. Et, évidemment, les travailleurs d'Air Littoral n'ont jamais été avertis du pourquoi de ces opérations financières alors, pourtant, que c'est eux qui allaient en payer la note.
Et l'histoire d'Air Littoral ne fait que reproduire celle d'Air Lib, dont la société du baron Seillière était l'actionnaire majoritaire avant qu'il revende ses actions, précipitant la ruine de cette entreprise et aboutissant, il y a un an, au licenciement de ses 4200 travailleurs, dont la majorité n'a pas retrouvé un emploi depuis.
Ce même baron Seillière, qui a joué ainsi avec l'emploi et la vie des travailleurs d'Air Lib, a osé déclarer, une semaine avant, qu'il trouvait "scandaleuse" la grève des contrôleurs aériens. Pour cet homme, ruiner la vie de milliers de personnes, c'est normal, c'est dans l'ordre des choses. Mais qu'une catégorie de travailleurs ose se servir de la grève, la seule arme dont ils disposent, pour se défendre, c'est scandaleux.
Mais, à côté d'Air Littoral ou d'Air Lib, combien de grandes entreprises licencient, suppriment des emplois, ferment des usines entières ou délocalisent, sans que les travailleurs de ces entreprises, sans que la collectivité aient leur mot à dire?
Ces grandes entreprises exercent un pouvoir exorbitant sur l'économie et, par là même, un pouvoir de vie ou de mort sur le sort de leurs travailleurs et sur le sort de toute une ville ou de toute une région.
C'est un pouvoir dictatorial tout à fait légal, protégé par la Constitution et les lois. L'État reconnaît aux grandes entreprises le droit de placer et de déplacer leurs capitaux au gré de leurs spéculations sans se préoccuper du coût social de leurs décisions. Pire, il les aide financièrement, soit directement par des subventions, soit indirectement par des dégrèvements d'impôts et par des allégements de charges sociales. C'est en raison de ces cadeaux au grand patronat qu'on creuse le trou de la Sécurité sociale et qu'on pousse au déficit le budget de l'État. Et on nous dit après qu'il n'y a pas d'argent pour les hôpitaux ou pour les écoles et que les assurés doivent accepter d'être plus mal remboursés pour combler le déficit de la Sécurité sociale!
Les élections régionales permettront à l'électorat populaire de dire qu'il n'est pas d'accord avec cette politique qui est poursuivie cyniquement par le gouvernement de droite, après avoir été poursuivie hypocritement par le gouvernement socialiste.
Voter pour les listes LO-LCR, c'est aussi affirmer que l'activité des grandes entreprises résulte du travail de milliers de travailleurs et concerne l'ensemble de la collectivité et qu'en conséquence, il serait normal que la collectivité puisse les contrôler et connaître le pourquoi de leurs choix. Et cela, non pas lorsqu'il est trop tard, non pas lorsque le couperet tombe et que les travailleurs se retrouvent à la porte, mais lorsque les décisions sont prises, souvent un ou deux ans avant!
Il faut supprimer le secret des affaires, pour que la population puisse constater que les licenciements collectifs ne sont jamais justifiés et qu'il est possible de faire d'autres choix, moins profitables pour les actionnaires, mais qui permettent de mettre fin au chômage au lieu de l'aggraver.