Crédit Lyonnais : Les mauvais coups des banquiers se précisent19/02/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/02/une1855.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Crédit Lyonnais : Les mauvais coups des banquiers se précisent

C'est au premier semestre 2003 que le Crédit Agricole a acheté le Crédit Lyonnais, lors d'une opération boursière de grande ampleur. Le CA a mis 20 milliards d'euros sur la table, dont une bonne partie a profité aux grands trusts de l'assurance et de la banque qui détenaient des actions du CL (AGF-Allianz et Axa entre autres).

Dans un premier temps, les dirigeants du CA comme ceux du CL ont entonné des hymnes à la gloire du nouveau groupe et exalté «l'excellence» de leur entente.

Puis, très vite, Peyrelevade, le président du CL, et Ferrero, le directeur général, ont été priés, par le nouveau propriétaire, d'aller voir ailleurs.

Ce départ ne les a pas laissés dans le dénuement: Peyrelevade avait pris le soin de se faire attribuer une retraite de 75% de son dernier salaire! Quant à Ferrero, il s'était fait garantir trois ans de salaire (soit 1,9 million d'euros) et aurait en outre, d'après le magazine Capital, réalisé une plus-value de 4 millions d'euros sur son portefeuille de stock-options.

Par contre, les dirigeants du CA et du CL étaient ensemble d'accord, dès le début, pour faire payer le rapprochement aux salariés, en décrétant 4 600 suppressions d'emplois en deux ans, dont 2 800 en France et 1 800 à l'étranger.

À l'étranger, les licenciements ont commencé. En France, la direction s'est engagée à ce qu'il n'y ait «aucun départ contraint». Mais le calcul est vite fait: les départs en retraite et en préretraite ne suffisent pas pour atteindre le chiffre de 2 800. Alors, la direction insiste sur la «mobilité interne», sur la possibilité de changer de poste. Mais cela ne créera aucun emploi.

Reste ce qu'elle a pudiquement baptisé «mobilité externe». Cela vise plusieurs centaines d'employés à qui elle compte «proposer» la sortie, avec un petit viatique pour la route.

L'importance des suppressions d'emplois qu'elle a programmées varie selon les secteurs.

Les agences sont épargnées (pour l'instant), ainsi que l'informatique et les centres administratifs.

Par contre, dans le crédit-bail par exemple, elle veut supprimer environ 15% des postes. Dans les fonctions centrales (comptabilité, finances, gestion de personnel), le pourcentage de postes supprimés varie entre 15 et 20%.

La direction a décidé de tailler plus encore dans les effectifs de la Banque de Financement et d'Investissement (BFI), qui traite des grandes entreprises, des marchés de capitaux et de l'international. Le secteur BFI du CL doit être absorbé en mai par Crédit Agricole Indosuez. Dans ce nouvel ensemble, baptisé Calyon, la direction veut supprimer plus d'un quart des emplois!

Au CL, une partie du back-office de BFI, la Direction des Opérations, est située à Paris-Bercy. Nous y sommes environ 280. Il y a deux semaines, la direction a annoncé que la grande majorité du secteur serait transférée à Saint-Quentin-en-Yvelines, en banlieue sud-ouest de Paris, courant 2005. Pour quelques dizaines d'autres, la destination serait le centre de Clichy (Hauts-de-Seine).

Cette annonce a provoqué une grosse émotion. Beaucoup d'entre nous habitent en banlieue nord ou en banlieue est, et ont déjà des temps de trajet conséquents. Et puis, quel sera notre avenir, dans quels postes, avec quels reclassements éventuels?

Mardi 10 février, 200 salariés se sont réunis à l'appel des syndicats et ont décidé de débrayer jeudi 12 au matin, pour aller remettre à la direction une lettre-pétition. Ce jour-là, c'est à 150 que nous sommes venus au siège du Crédit Lyonnais. Le DRH en personne a reçu une délégation comprenant cinq syndicalistes et cinq autres personnes.

Ce monsieur a osé se dire «surpris» que le transfert géographique fasse à ce point problème! Il a désigné un de ses subordonnés pour aller faire le tour du secteur et voir tout le monde. Et dès le vendredi matin, le directeur des back-offices de Calyon est venu à Bercy rencontrer les délégués locaux.

Tout le monde voit bien que c'est notre réaction collective qui a provoqué le soudain empressement de la direction à venir discuter. Après tous ces mois de morosité où la direction préparait ouvertement ses mauvais coups, c'est un premier grain de sable dans les rouages. Et ce n'est qu'un début.

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