Metaleurop SA et sa filiale Metaleurop Nord étaient deux sociétés françaises ayant comme maison-mère la toute-puissante et discrète société suisse Glencore, basée dans le canton suisse de Zoug, canton surtout connu pour son... respect du secret que les sociétés domiciliées sur son minuscule territoire souhaitent conserver. On sait que le chiffre d'affaires annuel de Glencore dépasse les 45 milliards de dollars, ce qui en fait le deuxième groupe suisse, derrière Nestlé, et la société a dégagé l'an dernier un bénéfice de 4,5 milliards. Mais on ne peut pas avoir plus de détails sur ses comptes ou sur ses actionnaires. Même ses activités et ses nombreuses filiales dans le monde entier sont extrêmement nébuleuses. Elle s'occupe -outre de la production de métaux non ferreux et du recyclage de résidus industriels- de négoce industriel au sens large: pétrole, métaux, armes, en prenant au passage de confortables commissions. Dans le langage des affaires, c'est un "trader", qui fait la pluie et le beau temps dans le négoce du plomb et du zinc, n'est pas mal placé dans le pétrole, et à qui le statut de société suisse a sans doute donné un parfum de respectabilité.

Mais en regardant de plus près, on s'aperçoit que la respectable Glencore a trempé dans bien d'autres affaires pas toujours très nettes. Par exemple, entre 1996 et 2000, elle aurait participé à d'importantes transactions, mêlant le rachat de la dette contractée par l'Angola envers la Russie (plusieurs milliards de dollars), les détournements de fonds, des ventes d'armes à l'Angola alors en guerre, s'associant avec les spécialistes en pots-de-vin et affaires louches Falcone et Gaydamak. En se moquant des injonctions internationales contre les ventes d'armes, ou des lois contre les pots-de-vin.

Glencore a été une des sociétés qui ont participé au pillage des ressources naturelles russes. Elle a profité de la vente à prix bradés du pétrole russe, des stocks d'aluminium, des stocks d'armes de l'armée, en arrosant au passage quelques "oligarques" et dignitaires du régime.

Même l'ONU l'a épinglée: en février 2003, Glencore a été prise en flagrant délit de non-respect des règles et accusée d'avoir détourné de l'argent du programme irakien "pétrole contre nourriture" avant l'intervention américaine. Elle avait acheté un million de barils de pétrole à l'Irak en prétendant qu'elle les vendrait aux États-Unis. En fait, elle les a vendus à la Croatie beaucoup plus cher, empochant au passage 3 millions de dollars qui auraient dû revenir à l'ONU, pour l'achat de médicaments et de nourriture à envoyer en l'Irak.

Et que découvrirait-on encore si on ouvrait les livres de comptes de la société Glencore?