Tous ensemble,tous ensemble, oui !22/01/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/01/une1851.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Tous ensemble,tous ensemble, oui !

Lundi 19 janvier, les sages-femmes de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris étaient en grève pour protester contre la modification de leurs horaires de travail. Le lendemain, des mouvements ont eu lieu à l'EDF contre la privatisation de cette entreprise. Mercredi la plupart des syndicats ont appelé les cheminots à la grève. Jeudi les salariés de l'Aéroport de Paris ont à leur tour été appelés à l'action pour s'opposer à la privatisation de celui-ci. Le même jour les agents hospitaliers et les médecins urgentistes ont fait grève pour obtenir plus de moyens pour les hôpitaux publics. Cela donne vraiment l'impression que pour les directions syndicales la règle est: pourquoi lutter tous ensemble quand on peut le faire en ordre dispersé!

Pourtant, même si les revendications ne sont pas identiques, les problèmes qui se posent à l'ensemble des salariés ont tous la même origine: l'offensive lancée par le Medef et le gouvernement contre le monde du travail. Cela se traduit dans certains cas par les projets d'abandon des services publics aux intérêts privés (comme à l'EDF) au détriment de ceux qui y travaillent et des usagers. D'autres fois par des suppressions d'emplois ou de postes de travail (comme à la SNCF, où le PDG Gallois a annoncé que 3500 départs ne seront pas remplacés par des embauches en 2004). Ou encore par la grande misère des hôpitaux qui manquent de moyens et de personnel pour assurer les soins. Et pour tout le monde du travail par la stagnation des salaires qui prennent de plus en plus de retard sur la hausse des prix. Mais tout cela est le résultat d'une politique qui vise à augmenter les profits des entreprises et des gros actionnaires et à diminuer leurs impôts au détriment des salariés et des contribuables les plus modestes.

Dans ces conditions, ce n'est pas par des luttes menées en ordre dispersé que nous ferons reculer le patronat et le gouvernement. Le patronat agit comme un seul homme. Et il ne se contente pas de revendiquer des miettes. Bien au contraire, à chaque fois que le gouvernement lui donne satisfaction, il réclame encore davantage.

Il est vrai qu'il a sur la classe ouvrière l'avantage d'avoir affaire à un gouvernement qui (comme ses prédécesseurs de droite ou de gauche) a pour seul rôle de permettre aux possédants de réaliser le plus de profits possible.

Mais le monde du travail a aussi des atouts que ne possède pas le patronat. Il a pour lui le nombre, et la force que lui donne son rôle indispensable dans la production, car la vie pourrait continuer sans les patrons, mais pas sans les travailleurs.

Encore faudrait-il se servir de ces atouts. Mais ce que cherchent les directions syndicales, ce n'est pas à utiliser la force et le poids de la classe ouvrière pour faire reculer le patronat et le gouvernement, c'est seulement d'être admis à négocier avec eux. Or, de négociations engagées sans s'être donné les moyens de faire sentir tout le poids du monde du travail, il ne peut rien sortir.

Beaucoup de travailleurs sont démoralisés, ne croient pas à la possibilité de faire reculer patrons et gouvernement. C'est vrai. Mais ce n'est certainement pas en entrant en lutte en ordre dispersé qu'ils retrouveront le moral.

Des journées d'action réussies pourraient redonner confiance aux travailleurs dans leurs propres forces. Mais à condition qu'elles cherchent à faire converger les mécontentements, qu'elles se donnent pour but de préparer une riposte d'ensemble du monde du travail, au lieu d'émietter les forces et les luttes de celui-ci.

Cela ne signifie évidemment pas qu'il ne faille pas participer aux différents mouvements auxquels appellent les directions syndicales. Au contraire, tous les travailleurs soucieux des intérêts de leur classe doivent s'efforcer d'en assurer le succès, car l'échec de ces mouvements serait un nouveau facteur de démoralisation. Mais en sachant que si nous voulons changer le cours des choses, il nous faudra le faire sans compter sur des dirigeants syndicaux dont la seule ambition est de discuter avec leurs "partenaires sociaux" (et le mot est tout un programme), et non faire reculer le gouvernement et le patronat.

Arlette LAGUILLER

Editorial des bulletins d'entreprisedu 19 janvier 2004

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