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Leur société
IVG : Il faut des moyens pour permettre le respect de la loi
Jeudi 15 janvier, la Cadac (Coordination pour le droit à l'avortement et à la contraception), le Mouvement pour le planning familial et l'Ancic (Association nationale des centres d'interruption de grossesse et de contraception) appelaient à un rassemblement entre 12 heures et 15 heures devant le ministère de la Santé pour «réclamer le respect de la loi sur l'IVG - contraception du 4 juillet 2001, les moyens de son application et la prise en compte des besoins des femmes». En effet, vingt-neuf ans après la première loi qui, en France, autorisa l'avortement, des milliers de femmes sont toujours contraintes d'aller avorter à l'étranger, faute d'un nombre suffisant de médecins et de lits dans les hôpitaux et cliniques.
Votée en 1975, après que des personnalités et des médecins ont eu le courage de dénoncer la tartufferie régnante, où tout le monde savait que chaque année des centaines de milliers de femmes avortaient clandestinement parce qu'illégalement, la première loi était assortie de conditions restrictives. Entre autres, elle n'autorisait l'IVG que dans les dix premières semaines de grossesse, soit à peine huit semaines après la constatation d'absence de règles. C'était un temps très court pour, d'abord, se rendre compte de son état, puis satisfaire aux conditions légales, c'est-à-dire la consultation médicale dans un centre d'IVG, le délai obligatoire de réflexion d'une semaine assorti d'un «entretien social préalable» pour tenter de faire revenir la femme sur sa décision, puis l'obtention d'un rendez-vous pour l'intervention.
En juillet 2001, une nouvelle loi a un peu assoupli ces conditions, notamment en supprimant le caractère obligatoire de l'entretien préalable pour les femmes majeures, en n'exigeant plus le consentement parental pour les mineures et en faisant timidement passer le délai de 10 à 12 semaines. Mais il est plus facile d'allonger ce délai sur le papier que de fournir réellement aux femmes des conditions satisfaisantes pour leur interruption de grossesse.
Dans leur communiqué de presse, les associations qui appelaient au rassemblement révèlent qu'il faut aujourd'hui attendre trois semaines pour obtenir un premier rendez-vous dans un centre d'IVG, que cette attente est «insupportable pour les femmes et oblige certaines à partir à l'étranger, alors que leur première demande s'inscrit dans les délais légaux.» Elles ajoutent: «Le fait de ne pouvoir répondre aux demandes des femmes, par manque de médecins, manque d'infirmières ou de place au bloc opératoire, est insupportable pour les équipes.»
Le secteur privé, qui ne brille pas par son sens du devoir et de la responsabilité, a carrément fermé les portes de nombreux services d'IVG. Le prétexte invoqué est bien sûr la non-rentabilité. Le tarif qui leur est payé par la Sécurité sociale -le même depuis 1991- serait selon leurs dires inférieur au prix coûtant. Ainsi, selon les associations pour le droit à l'avortement, sur le seul département de Paris, depuis quatre ans six cliniques sur onze ne pratiquent plus d'IVG, soit 2829 places en moins par an!
Quant à l'hôpital public, les services qui y pratiquent des IVG subissent depuis des années la même politique de réduction drastique de personnel et de crédits que tous les autres services. Et si, toujours selon les associations, les centres d'IVG du public ont réussi à augmenter leur activité depuis 2001, sans aucune augmentation de leurs moyens, il est un stade où ils ne peuvent plus faire face.
L'allongement du délai de 10 à 12 semaines -qui du reste n'a fait qu'aligner la France sur la moyenne des pays européens- ne sera d'aucune utilité si par ailleurs les femmes doivent attendre trois semaines pour obtenir un premier rendez-vous dans les centres d'IVG. Dans cette période de résurgence de l'ordre moral imposé par les curés de tout poil, il faut être vigilant, se battre pied à pied pour les droits que les femmes ont conquis, et être de toutes les mobilisations pour le respect du droit à l'avortement et à la contraception.