Irak : Un détenu battu à mort par les soudards de Sa Majesté08/01/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/01/une1849.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Irak : Un détenu battu à mort par les soudards de Sa Majesté

La visite "surprise" du Premier ministre anglais Tony Blair à Bassora, le 4 janvier, avait été préparée avec soin. A la veille d'une rentrée politique qui s'annonce difficile, il pensait reprendre l'initiative en se servant des médias pour réaffirmer une "bonne foi humanitaire" à laquelle l'opinion ne croit plus. Mal lui en a pris. Le jour même éclatait dans la presse britannique un scandale qui a immédiatement éclipsé cette façade angélique.

L'hebdomadaire Independent on Sunday du 4 janvier a révélé en effet, sous la signature de Robert Fisk, journaliste réputé pour son opposition à la guerre en Irak, les pratiques corrompues des forces britanniques à Bassora et les sévices auxquels elles se livrent contre la population.

Au centre de ces révélations se trouvent les soldats "d'élite" de la police militaire, que l'état-major britannique a spécialisés dans la chasse aux "terroristes" et, plus généralement, aux opposants à l'occupation occidentale.

Au début de l'été dernier, face à la montée des manifestations contre cette occupation, ces Rambos aux crânes rasés avaient investi l'ancien quartier général de la police secrète de Saddam Hussein à Bassora pour en faire un centre d'interrogation et de "triage" des suspects. À partir de ce centre furent lancées des opérations de ratissage dans les quartiers populaires de la ville, sous prétexte de rechercher des dépôts d'armes.

C'est au cours d'une telle opération qu'en septembre dernier, la police militaire découvrit deux pistolets et deux fusils cachés dans un café-hôtel. Forts de leur trouvaille, les soudards firent alors main basse sur tout l'argent qu'ils purent trouver et arrêtèrent huit jeunes dont le seul tort était de s'être trouvés sur les lieux au mauvais moment.

Trois jours plus tard, les huit hommes étaient retrouvés dans un hôpital militaire hors de la ville. Tous étaient gravement blessés, après avoir été systématiquement roués de coups dans le centre d'interrogation de la police militaire. L'un d'entre eux était mort sous les coups. Selon ses camarades, il avait subi un traitement "spécial" pour s'être plaint des larcins des soldats auprès d'un officier.

Circonstance aggravante, Robert Fisk dénonce, preuve à l'appui, comment les plus hautes instances des autorités britanniques d'occupation ont tenté d'étouffer le scandale, en offrant d'acheter le silence de la famille du mort par un chèque de 8000 dollars.

Mais celle-ci n'était pas à vendre. Le père du défunt, ancien colonel de l'armée de Saddam Hussein tombé en disgrâce après le soulèvement du Sud en 1991, a remué ciel et terre pour obtenir l'ouverture d'une enquête officielle et c'est en désespoir de cause que, par l'intermédiaire de journalistes irakiens, il a contacté Robert Fisk.

Il aura donc fallu pas moins de trois mois pour que ce scandale atteigne l'opinion anglaise. Mais, pour une victime connue, combien d'autres resteront anonymes parce que, par peur de représailles et manque de relations, leurs proches ont baissé les bras?

Voilà qui jette une lumière crue sur la réalité de l'occupation britannique dans le sud de l'Irak, occupation que le gouvernement Blair a toujours présentée comme "librement consentie" par la population (sous-entendu : contrairement à l'occupation américaine à Bagdad) et entièrement orientée vers la "reconstruction d'un Irak démocratique".

Mais la réalité, c'est que les forces d'occupation occidentales en Irak sont à l'image des intérêts qu'elles défendent. En tant qu'exécutrices des basses oeuvres des bourgeoisies impérialistes, elles en partagent la cupidité et la brutalité.

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