Sécurité sociale : Le Medef soigne d'abord...la santé des entreprises02/01/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/01/une1848.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Sécurité sociale : Le Medef soigne d'abord...la santé des entreprises

Daniel Bouton, PDG de la Société Générale, mais également un des porte-parole du Medef, s'est invité dans les colonnes du Monde pour indiquer quelques-unes des pistes que le grand patronat aimerait voir empruntées par le gouvernement quand il s'attaquera à la Sécurité sociale.

Bouton répète les sornettes que le patronat a lui-même inspirées pour expliquer le trou actuel de la Sécu. Il ne découlerait pas de l'augmentation des dépenses de santé, conséquence logique du fait que l'on vit plus vieux et qu'il existe plus de moyens de se soigner, ce qui a forcément un coût, mais d'une pseudo-boulimie de médicaments qui frapperait les assurés sociaux. Le remède proposé vise ceux-ci en premier lieu.

Dans sa recherche de recettes nouvelles, le porte-parole du grand patronat n'envisage pas qu'on ébrèche les profits des entreprises, a fortiori ceux des laboratoires pharmaceutiques ou des fournisseurs de matériel médical pour qui la Sécurité sociale est, depuis toujours, une précieuse vache à lait. Bouton est formel: on ne prélèvera pas plus sur les "actifs", entendez sur les profits des grandes entreprises. Dans ses "treize propositions" censées sortir le système de santé du déficit, il n'est pas prévu de supprimer les dégrèvements de charges sociales accordées au patronat. Pourtant, leur suppression suffirait à équilibrer les comptes.

En revanche, une fois de plus, il est proposé de s'en prendre aux malades, de différentes façons. Le Medef ne cesse de gémir que le patronat est trop imposé, mais quand il s'agit de la Sécu, il est pour surtaxer l'assuré. Il souhaite même que les "prélèvements sur les classes d'âge inactives" soient augmentés, c'est-à-dire de s'attaquer aux retraités en augmentant leurs cotisations sociales, par exemple par le biais de la CSG. Il envisage même une solution odieuse: le "dépénalisement des accidents thérapeutiques" ou encore le "plafonnement des indemnités" versées aux victimes d'un tel accident.

Pour ce qui est de la "gouvernance" de la Sécu, il propose qu'on en écarte les partenaires sociaux et qu'elle soit mise sous tutelle du ministre des Finances. Son budget serait ainsi intégré au budget de l'État et il n'y aurait pas à en discuter avec les représentants syndicaux siégeant à la Sécu, pourtant en général de bonne composition.

Enfin, dans sa dernière proposition, Bouton propose d'introduire dans le système de santé des "éléments de concurrence", ce qui permettrait l'entrée officielle des compagnies d'assurances privées qui salivent depuis longtemps sur le budget de la Sécu qu'elles aimeraient pouvoir détourner à leur profit.

Dans les remèdes de cheval proposés, il est surtout question de s'en prendre à l'assuré social, voire au malade, pour préserver les profits des grandes entreprises, et éventuellement en créer de nouveaux. Il n'est question ni de santé publique, ni de solidarité, et encore moins d'égalité de traitement des malades. Si le système envisagé ici voyait le jour, seuls pourraient vivre correctement les plus riches, ceux qui ont les moyens de se payer les meilleures mutuelles, ou plutôt les meilleures assurances, ou encore ceux qui n'ont pas besoin de dédommagement financier après un accident thérapeutique. Les autres, c'est-à-dire la très grande majorité, seraient renvoyés à la libre concurrence, cette loi de la jungle qui plaît tellement au Medef, où il n'y a que la santé des profits qui compte.

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