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Tribune de la minorité
Les vrais faux voeux de Jacques Chirac
Par des moyens que nous ne révélerons pas, "L'Etincelle" a pu se procurer, avant l'heure, les voeux de nouvel an du président de la république.
Travailleuses, travailleurs,
Je suis heureux de vous adresser, au nom de mon gouvernement et de mes amis du Medef, tous mes voeux pour l'année 2004.
A commencer par ceux de bonne santé: vous allez en avoir besoin. Nous avons en effet l'intention de réformer l'assurance maladie le plus tôt possible. Les ordinateurs de mes conseillers patronaux sont pleins de bonnes idées: dérembourser toujours plus de médicaments, faire payer les feuilles de soins, limiter les visites chez le médecin, multiplier les contrôles sur les arrêts maladie, augmenter la CSG sur les retraites, que sais-je encore! L'un de mes amis banquiers, monsieur Bouton, vient même de proposer que la Sécu se rembourse les soins aux personnes âgées en confisquant leur héritage.
Mais rassurez-vous: je n'ai pas l'intention d'appliquer tout cela d'un seul coup. C'est pas à pas, sans précipitation, que nous irons vers un système plus moderne, c'est à dire un système où la Sécu ne rembourse presque rien, et où chacun se débrouille comme il peut, avec ou sans mutuelle.
Une réforme équilibrée, c'est une réforme qui ménage les intérêts des tous: les patrons seront exonérés de cotisations sociales, les bénéfices des laboratoires pharmaceutiques et des cliniques privées seront préservés. Bien sûr, reste le trou de la Sécu. Ce sont mes amis qui l'ont creusé, mais c'est vous, chers salariés, qui devrez le rembourser. Logique, non?
Je saisis aussi l'occasion de ce Nouvel An pour vous souhaiter une grande longévité: avec mon ami Fillon, nous venons de prolonger la cotisation pour la retraite à 42 annuités, et nous avons l'intention de l'amener progressivement à 45. Ainsi, vous goûterez aux charmes du travail jusqu'à 65 ans au moins!
A ceux qui cherchent du travail, je souhaite aussi bien du courage, car à partir de ce 1er janvier, nombre d'entre eux devront malheureusement renoncer à être indemnisés par les Assedic. C'est une décision qui n'a pas été facile à prendre, croyez-le, mais les données économiques sont formelles: les profits des entreprises augmentent de moins en moins vite, chaque travailleur doit donc consentir des sacrifices.
En cette période de voeux, ayons aussi une pensée pour ceux qui viennent de tout perdre: ainsi Jean-Marie Messier, ex PDG de Vivendi, qui a dû renoncer à sa modique indemnité de licenciement de 8 millions d'euros (Ah! Le drame des licenciements!) Pensons aussi à notre cher François Pinault, PDG de Pinault-Printemps-La-Redoute, harcelé par la justice américaine, et qui n'a dû son salut qu'à l'intervention de l'État français, à ma demande. Vous ne verrez aucun inconvénient, chers concitoyens, à verser 770 millions d'euros pour que le pauvre homme échappe aux tracasseries judiciaires: les fêtes de fin d'année sont un moment propice aux élans de générosité.
Que l'année 2004 soit donc celle des bonnes décisions: lors des prochaines consultations électorales, vous voterez pour les candidats de la majorité présidentielle. A quoi vous servirait-il donc de voter pour la gauche plurielle? Vous savez comme moi que leur politique serait la même que la mienne, comme elle l'a été quand ils étaient au pouvoir. Voter pour l'extrême droite serait tout aussi inutile: Le Pen ne ferait pas mieux que mon ministre Sarkozy.
Mais, surtout, ne commettez pas la folie d'accorder vos suffrages à l'extrême-gauche. Pensez donc, des gens qui s'opposeront à tous les projets que je fais pour votre avenir, qui parlent d'interdire les licenciements ou vous proposent d'aller mettre votre nez dans les comptes des capitalistes!
Il ne me reste plus qu'à vous conseiller de démarrer l'année 2004 par une bonne résolution: ne plus faire grève. Cette année vous nous avez causé bien du tracas, à moi-même, à monsieur Raffarin et au baron Seillière.
Mon ami le comte de Robien a proposé qu'on vous retire le droit de grève, en instaurant un "service minimum". Le problème, c'est que dans les écoles, les hôpitaux ou les transports, c'est déjà tous les jours le service minimum. Je vous supplie donc de recourir à des formes d'actions plus raisonnables. Envoyez-moi des e-mails ou des cartes postales! Organisez des lâchers de ballons! Je pense même que je pourrais tomber d'accord là-dessus avec certains de vos chefs syndicaux. Demandez donc à Monsieur Chérèque!
Alors, salariées, salariés, unissons nos efforts et souhaitons que 2004 soit une bonne et heureuse année pour l'indice... CAC40!
Editorial des bulletinsd'entreprises "l'Etincelle"de la minorité du 29 décembre 2003
Convergences Révolutionnaires nE 30 (novembre-décembre 2003), bimestriel publié par la Fraction
Dossier: Gouvernement et patrons à l'assaut de la Sécurité sociale. Quelles médecines nous concoctent Raffarin, Mattei, les trusts pharmaceutiques et les assurances? Quel jeu jouent les syndicats?
Articles: LO-LCR au-delà des élections; voile à l'école et confusions à gauche et à l'extrême gauche; Belgique: les patrons licencient, les syndicats collaborent; Moyen- Orient: la guerre de Sharon aux Israéliens; Iran: quand l'Union Européenne courtise le régime des ayatollahs.
Pour se procurer ce numéro, 1,5 E, ou s'abonner (1an: 9 E; de soutien: 15 E) écrire à:LO, pour la Fraction, BP 233-75865 Paris Cedex 18Ou Les Amis de Convergences, BP 128-75921 Paris Cedex 19 - Sur le Net: http://www.convergencesrevolutionnaires.org