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Leur société
Raffarin aménage le territoire : Au profit des patrons
Le gouvernement fait grand bruit à propos de ses 50 grands projets d'aménagement du territoire qu'il envisage d'ici à 2012. Il en coûtera 20 milliards d'euros, dont 7,5 seraient fournis par l'État.
A cet effet, il déclare renoncer à la privatisation prévue des sociétés d'autoroutes. Il compte sur les péages pour financer l'opération. La réalisation de ces projets donnera sans doute lieu, comme à l'habitude, à des retards, certains ne verront même peut-être jamais le jour. Les élections approchant, il devenait urgent pour le gouvernement Raffarin de faire au moins des promesses. Mais les choix faits dans ces promesses sont significatifs.
«Pour une France attractive dans une Europe dynamique». Tel est le titre de ce projet. Attractive, mais pour qui? Pour les habitants des quartiers populaires, ou pour les patrons français et étrangers, leurs cadres et leurs entreprises? Car même si les huit nouvelles lignes de TGV promises serviront à une partie de la population, ce n'est pas à cette fraction que le gouvernement songe dans le choix de ces projets. Ces lignes étaient âprement revendiquées par le patronat local. Les Chambres de Commerce et d'Industrie faisaient pression sur tous les élus locaux, en faveur de leur adoption. Quelques projets ont été écartés, comme celui du TGV Paris-Orléans-Limoges-Toulouse. Les représentants patronaux de ces régions montent certainement au créneau pour protester.
Tout aussi significatifs sont les projets d'urbanisme annoncés à Marseille, Lille ou Saint-Etienne. «Renforcement du rayonnement économique, création de nouveaux quartiers d'affaires, politique foncière volontariste, accueil de sièges sociaux, de congrès», précise le texte du Premier ministre. Le projet Euroméditerranée, qui figure au nombre des 50 mesures annoncées, était ainsi promu dans une page du journal Le Monde: «Ce projet vise à faire de Marseille le grand centre d'affaires international du sud de l'Europe... Il prévoit en outre 600000 mètres carrés de bureaux». A Marseille comme ailleurs, il y aurait bien d'autres urgences en matière de logement. Sans parler de projets qui apparaissent ouvertement comme des subventions au patronat, tels «le renforcement de la compétitivité de l'Ile-de-France par la valorisation du grand ensemble technologique autour de Massy-Saclay» ou «la création d'un institut de management à Marseille» et «le grand projet portuaire de Fos 2XL visant à doubler le trafic de conteneurs de Fos».
Pendant que des milliards seront ainsi dépensés, des travaux bien plus nécessaires à la population, et en particulier aux familles populaires, resteront lettre morte faute de crédits. Le gouvernement se décharge de plus en plus sur les collectivités locales, sans leur fournir les moyens financiers. Les transports en commun utilisés chaque jour par la population sont traités en parents pauvres. Le gouvernement a, en effet, décidé de supprimer dans le budget 2004 les 200 millions d'euros de subventions accordés ces dernières années aux collectivités locales pour les transports, sommes qui finançaient parfois jusqu'à 20% des travaux nécessaires. Il a demandé aux collectivités locales de se contenter d'une dernière enveloppe de 65 millions pour solde de tout compte, afin de leur permettre de terminer ce qui était en cours.
Ce sont autant de lignes de tramways dont la construction sera retardée, de gares de quartiers populaires dont les usagers attendront la rénovation, de retards en banlieue et de trains supprimés dans les petites villes. Pour le réseau routier, si neuf projets autoroutiers sont programmés, le reste du réseau continuera à se dégrader faute de moyens suffisants. Et en matière d'urbanisme, pendant que l'on construira des lieux dédiés à l'accueil des sièges sociaux ou à des congrès, les cités ghettos auront encore de beaux jours devant elles. Aux villes de se débrouiller avec les problèmes de toute sorte que cela pose, avec de moins en moins de subventions. Le budget 2004 du Logement est en diminution de 7%. 43000 logements sociaux nouveaux vont être construits, alors qu'il en faudrait 120000. Les aides aux personnes pour se loger sont en diminution et le budget de l'Agence pour l'amélioration de l'habitat a été gelé.
Les grands projets du gouvernement ne visent, cette fois encore, qu'à soutenir le patronat.