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Dans le monde
Turquie : La population victime des attentats
À Istanbul le 15 novembre, vingt-cinq personnes périssaient et plus de trois cents étaient blessées dans l'attentat contre deux synagogues. Cinq jours plus tard, le 20 novembre, les attentats kamikazes contre le consulat d'Angleterre et le siège de la banque britannique HSBC faisaient 32 morts et 450 blessés, en grande majorité des travailleurs et des employés.
Des attentats qui n'ont pas surpris la population
En Turquie, on ne peut pas dire que ces attentats aient surpris la population, surtout après l'attentat suicide qui, le 14 octobre, a frappé à Bagdad l'ambassade de Turquie.
Certes, en mars dernier, et contre toute attente, la Turquie n'avait finalement pas participé à l'invasion de l'Irak aux côtés de l'armée américaine. Mais, en septembre, quand Bush a appelé à l'aide, quand il a demandé que des troupes amies viennent prêter main-forte à ses soldats enlisés dans le piège irakien, le gouvernement turc a annoncé -contre une promesse de 8,5 milliards de dollars de crédits- son accord pour déployer des forces sur le sol irakien. Et si l'armée turque, qui était fin prête, n'est finalement pas partie pour l'Irak, c'est notamment à cause de l'opposition des Kurdes irakiens, qui menaçaient même de changer de camp et de ne plus soutenir l'Amérique, tout comme de l'opposition des autorités mises en place en Irak par les États-Unis eux-mêmes.
Quoi qu'il en soit, le gouvernement turc continue à appuyer la politique de l'impérialisme américain dans la région et collabore étroitement avec l'État d'Israël en lui ouvrant par exemple son espace aérien afin que les avions israéliens puissent s'entraîner dans un ciel bien plus vaste. Cette politique a bien sûr pour but de défendre les intérêts de l'impérialisme au Moyen-Orient, surtout les intérêts des trusts pétroliers, ce qui attise la haine des peuples de la région. La population turque, quant à elle, réprouve à plus de 90% l'idée que l'armée turque pourrait intervenir en Irak.
Qui sont les auteurs des attentats ?
Au début, il a été question d'Al-Qaida, ensuite on a parlé de groupes intégristes turcs qui seraient aidés par Al-Qaida, comme les Combattants du Grand Orient (IBDA-C) et le groupe Hizbullah.
Cette dernière organisation, implantée dans les régions kurdes de la Turquie, a bénéficié du soutien de l'État turc pour assassiner, dans les années 1990, les militants kurdes du PKK, qui menaient une lutte armée de libération nationale. À preuve, en janvier 2000, on a retrouvé dans des caches du Hizbullah des armes enregistrées comme propriété du ministère de l'Intérieur turc, et un des chefs d'une branche armée de cette organisation était en possession, lors de son arrestation en 1996, d'un passeport des renseignements généraux turc (MIT).
Dans ce domaine, l'État turc a des "traditions". Depuis les années soixante il n'a pas hésité à utiliser les groupes terroristes et intégristes de tout poil contre les Kurdes, la classe ouvrière et le mouvement communiste.
Ce serait, en quelque sorte, un scénario à la Ben Laden qui se serait opéré en Turquie. Tout comme les États-Unis avaient en leur temps aidé, soutenu, armé Ben Laden contre les Russes en Afghanistan, les gouvernements turcs ont eux aussi aidé, soutenu, armé des bandes d'islamistes qui mènent aujourd'hui leur propre vie, leur propre jeu.
Il est évident que quel que soit le ou les groupes terroristes qui sont derrière ces attentats (dont les victimes sont en général des travailleurs), leur visée n'est sûrement pas de défendre la justice sociale. Tout ce dont ils rêvent c'est d'établir un régime réactionnaire, comme celui des talibans afghans, où les femmes et les travailleurs seraient ravalés au rang d'esclaves!
La population en général et surtout les travailleurs ne peuvent absolument pas compter sur l'État turc pour se défendre contre ce genre d'attentats. D'autant plus que l'État turc pourrait se saisir de ces attentats pour accroître encore les pratiques répressives qu'il avait dans une certaine mesure mises en veilleuse en vue d'intégrer l'Europe!