Chômeurs : Qui sème la misère récolte la colère19/11/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/11/une1842.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Chômeurs : Qui sème la misère récolte la colère

En plus de la campagne d'opinion orchestrée par le gouvernement, assimilant les chômeurs à des fainéants, des mesures très concrètes se mettent en place, portant atteinte aux indemnisations auxquelles les chômeurs avaient droit jusqu'à présent. Ces mesures découlent du protocole signé entre le patronat et certaines organisations syndicales (CFDT, CGC et CFTC) en décembre 2002.

Déjà depuis janvier 2003, une partie des chômeurs ont vu la durée de leurs indemnités raccourcie. A partir du 1er janvier 2004, des dizaines de milliers d'autres vont à leur tour être touchés. L'application du protocole va se faire de manière rétroactive pour ceux qui étaient indemnisés avant le 1erjanvier 2003 et qui pensaient bénéficier de l'ancien régime d'indemnisations. Ainsi, tous ceux dont la fin de l'indemnisation devait se situer entre janvier et juillet 2004 verront leurs indemnités brutalement stoppées au 31 décembre 2003. Dès le 1er janvier, plus de 350000 chômeurs vont du coup se retrouver en fin de droits. Et il s'agit d'une estimation probablement inférieure à la réalité.

Pour tenter de rendre ce mauvais coup moins visible, les nouvelles dispositions ont été étalées dans le temps, en dissociant les nouveaux chômeurs des anciens. Mais aussi, l'information n'a été donnée que goutte à goutte.

Ainsi, le 3 janvier 2003, tous les chômeurs en cours d'indemnisation ont reçu une lettre qui tentait de les rassurer sur «les nouvelles mesures prises concernant l'indemnisation des demandeurs d'emploi», avec la phrase suivante: «Les mesures prises préservent votre indemnisation; sa durée et son montant sont inchangés jusqu'au 1er janvier 2003». Mais on pouvait lire un peu plus loin: «Dans l'hypothèse où vous seriez indemnisé à la fin de l'année 2003, votre allocation pourrait être modifiée», ce qui laissait entendre que l'Assedic connaissait les conséquences du nouveau protocole et se gardait bien d'en informer les intéressés.

C'est individuellement et au compte-gouttes, au gré d'un rendez-vous à l'ANPE, d'une fin de formation, d'un courrier qu'ils doivent déchiffrer, et toujours sans aucune justification ni explication, que les chômeurs ont «appris» la réduction de leur durée d'indemnisation.

Ceux qui ont voulu en avoir le coeur net ont dû mettre en demeure leur Assedic de leur apporter l'information.

Les chômeurs qui ne percevront plus l'Assedic toucheront, s'ils y ont droit, l'ASS (l'allocation spécifique de solidarité) ou le RMI, et tous verront leur revenu chuter brutalement. Rappelons également que ces aides sociales sont à la charge de l'État, et non plus des caisses de l'Unedic -ce qui est autant de moins à payer pour les patrons.

A cela, s'ajoute la «réforme» de l'ASS, ramenée de trois à deux ans, et du RMI, avec l'introduction du RMA, véritable travail forcé au plus grand profit du patronat qui empochera le montant du RMI, ce qui réduira d'autant sa contribution au salaire.

Cette avalanche de mesures contribue à déstabiliser davantage les dizaines de milliers de travailleurs privés d'emploi. Parmi ceux qui sont touchés dès 2004, certains avaient commencé une formation qu'ils ne pourront pas mener jusqu'au bout. Pour ceux qui découvrent la réduction de leur indemnisation, c'est à chaque fois un drame, une incompréhension, le sentiment d'être floué. Et tous ressentent la pression du temps. Des chômeurs se retrouvant plus rapidement encore en fin de droits et sans ressources, c'est en effet autant de personnes prêtes à accepter des emplois sous-payés, des statuts précaires, des conditions de travail dégradées qui, inévitablement, pèseront à leur tour sur l'ensemble du monde du travail.

Pour les chômeurs, s'organiser n'est pas simple, compte tenu de leur dispersion, de leur situation diverse et par nature transitoire. Ceux qui voudraient réagir trouvent difficilement les moyens d'informer efficacement les autres pour participer à une réunion ou à une action.

Néanmoins, le mécontentement commence à s'exprimer. Certaines réunions se sont tenues à Paris, à l'initiative de la CGT chômeurs par exemple, où certains ont parlé de leur situation: la vente de leurs meubles, les déménagements dans la famille pour éviter le paiement d'un loyer, les problèmes avec les enfants. Des associations de chômeurs envisagent une journée d'action pour le 6 décembre. Les attaques répétées du gouvernement et des patrons contre les travailleurs qu'ils privent d'emploi ne peuvent que faire monter la colère des chômeurs, directement victimes de ces mesures, comme de l'ensemble du monde du travail!

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