Irak : Bush s’installe dans la guerre05/11/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/11/une1840.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Irak : Bush s’installe dans la guerre

En menaçant le Congrès américain d'user du droit de veto présidentiel, Bush a finalement obtenu les 87,5milliards de dollars (76,8milliards d'euros) de crédits supplémentaires qu'il exigeait pour financer ses aventures impérialistes en Irak et en Afghanistan.

Tant pis si cette somme colossale gonfle d'autant l'énorme déficit public américain. De toute façon, les États-Unis en feront partager une partie du coût au reste de la planète, par le biais de la dépréciation du dollar sur le marché des changes.

Il est vrai que l'opposition du Congrès portait plus sur la forme que sur le fond. Il ne s'est pas trouvé une voix parmi les parlementaires américains pour remettre en cause les 64,7 milliards de dollars (51 milliards concernant l'Irak et 13,7 milliards concernant l'Afghanistan) qui, sur le total, sont explicitement affectés aux dépenses militaires. La seule opposition a pris la forme de l'exigence exprimée par les Démocrates et certains Républicains que les 18,6 milliards de dollars de «crédits à la reconstruction» pour l'Irak soient convertis en prêts remboursables par les bénéficiaires, histoire de laisser entendre qu'il ne s'agirait pas de dépenses définitives.

Bush, qui sait bien que ces prétendus «crédits à la reconstruction» sont avant tout destinés à remplir les coffres des trusts américains, n'a rien voulu entendre. Et, après cet acte d'opposition symbolique adressé au contribuable-électeur américain, les congressistes se sont laissé convaincre.

En tout cas, le montant de ces crédits militaires supplémentaires, qui se rajoutent aux 300 milliards de dollars du budget du Pentagone, indique à l'évidence que Bush n'a aucune intention de réduire la présence militaire américaine en Irak dans un avenir prévisible. D'ailleurs, selon la presse américaine, même les plus optimistes des stratèges du Pentagone n'envisagent plus de retrait substantiel de troupes avant 2005 au plus tôt.

Si Bush a cru sérieusement que sa guerre d'agression contre l'Irak aboutirait rapidement à la mise en place d'un régime pro-américain capable de tenir la population en respect tout en préservant les intérêts américains dans la région, il s'est de toute évidence lourdement trompé. L'effondrement du régime de Saddam Hussein a créé un vide étatique que les 130000 soldats de l'armée américaine ne pouvaient guère combler dans un pays de 25 millions d'habitants, même en tentant de s'appuyer sur des institutions fantoches. Dans ce vide, on a pu voir se développer au cours des mois écoulés tous les éléments d'une situation politiquement explosive. Cette situation s'exprime, sur le plan militaire, par la vague d'attentats de plus en plus meurtriers et de mieux en mieux organisés qui visent aussi bien les forces américaines que les politiciens et policiers qui collaborent avec elles. Et, malgré les rodomontades de Bush prétendant contre toute évidence qu'il faudrait voir dans ces attentats l'expression des «progrès vers le rétablissement de la démocratie» réalisés par les forces d'occupation, ils ne sont que le reflet de leur impuissance croissante à contrôler la situation.

Dans ce contexte, il est difficile pour Washington de mener à bien ce qui constituait l'un des objectifs de la guerre contre l'Irak -permettre aux trusts impérialistes, américains en particulier, de faire main basse sur les richesses naturelles du pays. Malgré la présence en force de l'armée la plus sophistiquée de la planète, avec tous les moyens de surveillance aérienne dont elle dispose, sans parler des 20000 Irakiens recrutés pour garder les installations pétrolières, la production irakienne de pétrole est toujours loin de ce qu'elle était avant la guerre et ses exportations sont pratiquement inexistantes, faute de réussir à assurer la sécurité des oléoducs contre les opérations terroristes.

Du coup, l'impérialisme américain doit choisir entre abandonner le terrain et renoncer à satisfaire l'appétit insatiable de ses trusts, ou, au contraire, prendre le risque d'un enlisement militaire et politique. Pour l'instant, c'est cette dernière option que choisit Washington, sans aucun égard pour les dangers qu'elle implique pour la population irakienne et la stabilité politique de la région tout entière.

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