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Russie : Petite biographie d’un «nouveau riche»
Khodorkovski a débuté sa carrière à la faveur de la perestroïka, sous Gorbatchev. Dans l'URSS de la fin des années quatre-vingt, en pleine déliquescence du fait des luttes au sommet et dans les régions entre clans dirigeants de la bureaucratie, des gens comme lui se lancèrent dans les «affaires» à une échelle de plus en plus vaste. Alors comme maintenant, la clé de leur succès était le soutien du pouvoir ou d'une de ses fractions.
Khodorkovski, responsable de l'organisation de jeunesse du PC soviétique, eut l'appui de dirigeants de l'appareil du parti et de l'État pour participer aux activités lucratives des «Centres de créativité technique de la jeunesse». En fait de «créativité», ces jeunes bureaucrates revendaient en URSS du matériel informatique occidental. Pour cela, il fallait avoir des licences d'importation et l'autorisation d'aller à l'étranger: leurs protecteurs haut-placés y pourvoyaient contre un partage des bénéfices, d'autant plus considérables que les Khodorkovski et Cie jouissaient d'un monopole.
Autre combine alors prisée de ce milieu car très rentable, le business de charité. Khodorkovski obtint de Gorbatchev qu'il confie à Menatep, la banque qu'il venait de créer, la gestion des fonds d'aide aux victimes de la catastrophe de Tchernobyl. Ses appuis et sa banque lui permirent de blanchir des masses d'argent et de les expédier sur des comptes à l'étranger. Avec d'autres, sa banque servit aussi à transférer à l'étranger des fonds pour le compte de la haute direction du PC et du KGB.
Sous Eltsine, Menatep prospéra dans l'exportation de métal et de pétrole, vendus aux cours mondiaux mais achetés aux cours locaux, cinq à dix fois plus bas. Il fallait «arroser» les autorités, mais cela rapportait gros. Ainsi Elstine chargea Menatep de vendre le groupe pétrolier d'État Ioukos: Khodorkovski rafla pour 350 millions de dollars ce groupe aujourd'hui estimé à 15 milliards de dollars.
Le krach financier d'août 1998 plongea le pays dans la récession, et la population dans une misère encore plus noire. Comme d'autres banques, Menatep avait précipité ce krach en pillant les finances publiques et elle s'en sortit avec profit. Ayant placé ses actifs à l'étranger, elle profita de sa «faillite» (ses déposants ne revirent jamais leur argent) pour transférer son siège à Gibraltar, où elle détient depuis le plus gros du capital de Ioukos.
À 39 ans, son PDG, l'homme le plus riche de Russie, dort provisoirement à l'ombre. Son argent, lui, est au soleil.