Maison de retraite MRP (Bordeaux) : Humanité ou rentabilité?24/10/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/10/une1838.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Maison de retraite MRP (Bordeaux) : Humanité ou rentabilité?

La canicule de cet été a mis en lumière les conditions de vie des résidents des maisons de retraite. Au manque de moyens s'ajoutent, par souci de rentabilité, des économies de personnel et les mauvaises conditions de travail qui en découlent.

Ainsi dans cette maison de retraite de Bordeaux, après un changement de direction, les conditions de travail se sont dégradées. Le nouveau responsable, un ancien expert-comptable, n'a a priori qu'une ambition, "faire tourner la maison sans exploser le budget". Pour cela, il a revu à la baisse tous les temps impartis aux soins. Il a prétexté un sureffectif et fait des pressions sur le personnel soignant pour qu'il s'en aille, s'il n'acceptait pas son planning de fou.

En effet un week-end de repos toutes les six semaines était de règle. Il imposait sept jours consécutifs de présence, incluant alternativement un samedi ou un dimanche. Ce rythme de travail a bien sûr poussé quelques-uns au départ et fait naître des tensions entre collègues. A cela s'ajoutaient la pression et le harcèlement pour le moindre prétexte, qu'il faisait subir à tous les employés.

Face à cette ambiance peu supportable, un petit collectif de soignants a décidé de réagir et de se défendre. Contact a été pris avec l'inspection du travail et le directeur a dû revoir sa copie et appliquer, non sans réticence, les normes de travail de la convention collective.

Le repos hebdomadaire et les deux jours consécutifs de repos à la quinzaine incluant un dimanche ont été obtenus, ainsi que les 11 heures de repos entre chaque période de présence.

Mais c'était sans compter sur la ténacité de ce responsable qui pense rentabilité, alors qu'il faut du temps et du personnel pour être à l'écoute des résidents âgés.

S'il a respecté le minimum conventionnel, il s'est arrangé pour que le personnel soignant en passe par ses exigences, et cela se traduit à nouveau par des plannings et roulements insensés. Tous les soignants sont soumis à des amplitudes de disponibilités de 11 heures avec des coupures telles que: 9h-13h, 17-20h, cela durant un mois. Comment avoir un minimum de vie familiale avec de telles journées?

Dans ces créneaux horaires, un seul soignant aux heures de repas ou de coucher a souvent la responsabilité d'environ 60 personnes. Comment, dans ce cas-là, assurer la sécurité de personnes manquant d'autonomie? La moindre chute ou le moindre malaise peuvent prendre des proportions dramatiques.

À cela, il faut aussi ajouter le "minutage" des toilettes que ce directeur impose et qui va de cinq minutes à une demi-heure, selon des critères qu'il a lui-même définis, sans tenir compte du besoin réel des personnes âgées.

À chaque réaction des soignants, il a une seule réponse: "Ou vous en passez par là, ou vous partez!" Mais cela ne décourage pas celles et ceux pour qui seules de meilleures conditions de travail et du personnel en suffisance permettront d'assurer aux résidents l'attention et les soins dont ils ont besoin.

Et ceux-là dénoncent le fait que certains responsables gouvernementaux n'ont eu de cesse, depuis l'été, de se dédouaner et de montrer du doigt les personnels soignants, alors qu'ils font la part belle aux restrictions de budget et laissent des responsables locaux confondre rentabilité et humanité.

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