Sécurité sociale : À la baisse !16/10/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/10/une1837.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Sécurité sociale : À la baisse !

Pour combler le prétendu déficit de la Sécurité sociale, en particulier celui de la branche Maladie, Raffarin continue d'avancer ses pions, ou plutôt de faire avancer son rouleau compresseur, en préconisant des mesures qui vont toutes dans le même sens: faire payer les assurés, c'est-à-dire les travailleurs, les retraités, les chômeurs.

Lundi 13 octobre, il a mis en place, en grande pompe, un "Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie" composé de patrons, de médecins libéraux, de directeurs d'hôpitaux et de cliniques, de députés (5 de droite et 1 de gauche), et accessoirement de quelques syndicalistes. Jean-Pierre Raffarin leur a demandé de réfléchir d'ici à la fin de l'année aux mille et une manières de faire des économies dans "cette Sécurité sociale qui exprime nos idéaux de bien-être et de solidarité", dans ce "trésor social", ce "bien public".

Voilà pour la galerie. Mais Raffarin, en bon pédagogue et pour être sûr du résultat des réflexions des experts, a tenu à dicter ce qu'il voulait trouver en demandant: "Quel est le juste équilibre entre solidarité collective et responsabilité individuelle?" Et aussi: "Faut il couvrir dans les mêmes conditions une fracture du bras causée par une chute dans la rue, ou par un accident de ski?"

Mettre les réponses dans les questions, quelle habileté, quelle subtilité de la part du Premier ministre! Et au cas où les sages n'auraient pas compris, il a mis les points sur les i, en dénonçant "le sentiment de gratuité de notre système de santé", et en faisant la distinction dans la protection sociale entre "les besoins essentiels et d'autres plus subjectifs".

Sa nouvelle réforme, qu'il nous promet pour l'année 2004 (après les élections), c'est en fait la poursuite de la déprotection sociale. C'est la suite des mesures prises ces derniers mois (déremboursement total de 84 médicaments, abaissement du taux de remboursement de 65 à 35% de 617 autres, hausse du forfait hospitalier, contrôle plus étroit de l'obtention du 100% en cas d'opération chirurgicale, chasse aux arrêts de travail "injustifiés"). Le gouvernement veut faire considérer comme normal que la Sécurité sociale ne couvre pas l'ensemble des domaines de la santé. Cela a toujours été vrai, en particulier pour tout ce qui concerne les soins dentaires, les lunettes et les appareils auditifs. Mais une part toujours plus importante est maintenant à la charge directe des assurés.

De fait, aujourd'hui, pour être correctement "couvert", il faut payer deux fois. Une fois par ses cotisations à la Sécurité sociale, une deuxième fois par les mutuelles complémentaires ou par les assurances privées. Eh bien la première protection, celle de la Sécurité sociale, celle qui permet, ou plutôt celle qui permettait à la grande majorité de la population d'être soignée, cette protection diminue d'année en année. Pour tous ceux qui ne peuvent pas se payer de mutuelle ou d'assurance complémentaire, cette diminution est dramatique. Elle concernerait, pour les chiffres les plus optimistes, 8% de la population, soit 5millions de personnes, sans compter les bénéficiaires de la CMU (Couverture maladie universelle).

Mais même pour ceux qui ont une "complémentaire", ces mesures, passées et à venir, vont avoir des conséquences financières importantes, car le prix des mutuelles et des assurances, déjà en augmentation, risque de s'envoler. Rien qu'avec les mesures déjà annoncées, les nouveaux transferts coûteront aux mutuelles 1milliard d'euros. Les AGF, un des principaux assureurs complémentaires privés, ont déjà annoncé une augmentation de 3% de leurs tarifs.

Les grands groupes d'assurances privés, qui ne rêvent que d'accéder un peu plus à cet énorme gâteau, se frottent les mains. Axa, Groupama et AGF multiplient les plates-formes téléphoniques pour prodiguer services et conseils, en offrant de couvrir ce que la Sécurité sociale ne rembourse plus. Raffarin leur a même promis un coup de pouce supplémentaire, en leur assurant qu'"une juste place sera faite à ces acteurs engagés dans la gestion du risque maladie et dans l'amélioration de la prise en charge des dépenses de santé".

S'il y a un trou dans le budget de la Sécurité sociale, ce sont les gouvernements successifs, ceux de Balladur et de Jospin comme celui de Raffarin, qui l'ont creusé pour offrir généreusement des dizaines de milliards d'euros chaque année aux patrons et aux actionnaires. Ce sont les patrons qui en ont profité, en récoltant, en particulier avec les lois de Robien et Aubry, ces dizaines de milliards d'euros d'exonérations de cotisations qui auraient dû aller à la Sécurité sociale. Et en maintenant au chômage des millions de travailleurs, en continuant à en licencier par dizaines de milliers, ils aggravent encore énormément ce déséquilibre.

Les réformes promises par Raffarin ne visent pas à améliorer le système de santé, elles visent à faire payer encore plus les travailleurs pour leur santé. Contrairement aux mensonges gouvernementaux, elles auront pour résultat de détruire encore un peu plus la santé de chacun.

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