Le procès ELF n’y changera rien : Les affaires continuent18/07/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/07/une1824.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Le procès ELF n’y changera rien : Les affaires continuent

Le procès Elf aura duré trois mois et demi. Il s'est terminé lundi 7 juillet par la plaidoirie des avocats d'André Tarallo, l'ancien "monsieur Afrique" du groupe pétrolier. Les verdicts seront rendus en novembre.

Avec Le Floch-Prigent et Sirven, Tarallo était le troisième "gros poisson" d'Elf, mis en cause dans le détournement de centaines de millions de francs. Pour sa défense, ses avocats ont expliqué que leur client n'avait été que le serviteur attentionné de chefs d'Etat africains lorsqu'il alimentait pour eux des comptes secrets en Suisse, et particulièrement d'Omar Bongo, le dictateur gabonais. Pour le reste, Tarallo plaide "non coupable".

Qu'il ait été le valet de luxe du groupe Elf en Afrique, c'est vrai; qu'il ait été complice de l'enrichissement fabuleux de dictateurs africains en affaires avec Elf, c'est tout aussi vrai. Dans les affaires du groupe pétrolier, à des positions différentes, les Tarallo ou les Bongo ne sont de toute façon que des commis. Lors des réquisitoires, cinq ans de prison ont été demandés contre Le Floch-Prigent, huit contre Sirven et Tarallo dont le système de défense n'a, semble-t-il, convaincu personne.

Mais sur le fond, qu'est-ce que cela changera pour les peuples d'Afrique dont les gouvernants sont soutenus hier par Elf, aujourd'hui TotalFinaElf ? Qu'est-ce que cela changera aux méthodes d'exploitation et de pillage du groupe pétrolier en Afrique et ailleurs ? Rien, car à aucun moment n'ont été mis en cause dans ce procès ni les milliards de profits engrangés sous la direction de Le Floch-Prigent ni à plus forte raison les méthodes qui permettent ce résultat, et dont l'argent de la corruption n'est finalement qu'un peu d'huile versée dans le système pour qu'il continue de prospérer; des "méthodes" qui ne sont pas celles du seul groupe Elf mais de tous les grands groupes capitalistes de la planète.

Ce procès, dont on disait qu'il allait faire "exploser la République" n'aura été qu'un pétard mouillé. Il n'aura pas bousculé grand-monde parmi ces politiciens de droite comme de gauche qui ont profité de la manne du groupe pétrolier, cela vaut aussi bien pour Chirac que pour les Mitterrand, père et fils ou encore Roland Dumas. Tous en sortent indemnes.

Quant aux pratiques mises en lumière au cours des audiences, elles n'ont fait que lever - un peu - le voile sur la nature du capitalisme: une machine à engranger des profits, qui pour les besoins de cette cause arrose au passage quelques intermédiaires.

Mais ces pratiques ne peuvent que continuer. On parle déjà dans la presse d'une autre enquête sur la destination de quelque 70 millions de dollars versés par Elf lors d'un contrat signé avec le Nigeria en 1995. A cette époque, ce n'était déjà plus Le Floch-Prigent mais son successeur Jaffré (aujourd'hui chez Alstom) qui était à la tête d'Elf. Et ce dernier a déjà eu l'occasion de justifier, en marge de ce procès, la "méthode" des pots-de-vin, indispensables au bon fonctionnement du système.

Les affaires continuent. Et les "affaires" également, du moins tant qu'on n'en aura pas fini avec le capitalisme.

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