Des enseignants aux intermittents : Plus facile de dénoncer les grévistes que les patrons responsables18/07/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/07/une1824.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Des enseignants aux intermittents : Plus facile de dénoncer les grévistes que les patrons responsables

L'annulation de plusieurs festivals, suite au mouvement des intermittents du spectacle, a soulevé de vives protestations de la part de certains commentateurs, politiciens, représentants du gouvernement ou du patronat. Selon eux, la grève des intermittents aurait provoqué un "énorme manque à gagner" pour les commerçants et les hôteliers des villes concernées. Ce qui est d'ailleurs une façon de reconnaître qu'habituellement, le travail des intermittents leur rapporte bien plus que cela leur coûte, sans qu'ils contribuent de façon significative au financement des spectacles, et encore moins aux caisses de chômage des intermittents.

Les commerçants et les hôteliers auraient été, selon eux, tout comme les spectateurs, "pris en otage" par les grévistes. Ils omettent tout simplement de rappeler que les premiers responsables de cette situation sont des employeurs, notamment ceux des chaînes de télévision et des sociétés de production, qui prospèrent grâce au statut précaire des intermittents. Sans oublier bien sûr le gouvernement qui, pour satisfaire le Medef, a décidé d'entériner une réforme des conditions d'indemnisation du chômage défavorable aux salariés.

C'est devenu une habitude. Dès que des travailleurs se mettent en grève pour défendre leurs conditions de vie, ils sont immédiatement dénoncés comme prenant en otage des usagers, des entreprises ou d'autres salariés. Mais ceux qui sont si prompts à dénoncer ces "prises d'otages" le sont moins lorsque des patrons comme le baron Seillière ou l'Etat décident pour satisfaire leurs actionnaires de liquider une compagnie aérienne comme Swissair ou Air Lib, supprimant du même coup non seulement des milliers d'emplois mais encore des dessertes reliant plusieurs villes entre elles. Et les dirigeants de la SNCF, ne prennent-ils pas délibérément des milliers d'usagers en otage lorsqu'ils décident de supprimer des trains, des arrêts ou des lignes entières qualifiés de non rentables ? Et que fait La Poste quand elle restreint la distribution du courrier ou ferme des bureaux dans les zones rurales ? Et tous ces gens qui se prétendent soucieux du sort de la collectivité, qu'attendent-ils aussi pour dénoncer le gouvernement lorsque celui-ci décide, sous prétexte de restrictions budgétaires, de fermer ici une école, là une maternité ou un service hospitalier ? Et dans ce dernier cas, ce n'est même plus une "prise en otage" mais une mise en danger de la vie d'autrui.

Il y a au moins une leçon que nous donnent ces pleurs et ces accusations portés par les ministres, le Medef et leurs alliés contre les salariés en lutte: quand les travailleurs s'arrêtent de travailler, des pans entiers de l'économie sont bloqués. Preuve que rien ne tourne sans la contribution des exploités.

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