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Grande-Bretagne : Blair désavoué par son propre électorat
Les élections municipales partielles qui se sont déroulées le 1er mai en Grande-Bretagne ont été marquées une fois de plus par un recul spectaculaire du Parti Travailliste de Tony Blair. Mais cette fois, en plus de la politique antiouvrière du gouvernement travailliste, c'est sa participation à la guerre impérialiste de Bush en Irak que l'électorat a désavouée.
En effet les seuls courants politiques à gagner des voix sont ceux qui ont pris position contre cette guerre. Ainsi nombre des 161 candidats du regroupement d'extrême gauche Socialist Alliance, présents dans ces élections sur une plate-forme antiguerre, doublent ou triplent leurs scores antérieurs. Mais, sur l'ensemble des 12000 postes de conseillers municipaux à renouveler, le grand gagnant est le Parti libéral-démocrate, le plus petit des trois grands partis et le seul qui se soit élevé contre la guerre, tout au moins avant son déclenchement. C'est ainsi que pour la première fois dans leur histoire, les libéraux-démocrates sont à égalité avec les travaillistes, avec 30% des suffrages exprimés.
Si l'on compare cette élection avec le dernier scrutin équivalent, en 1999, on constate que les 6% gagnés par les libéraux-démocrates correspondent exactement aux 6% perdus par les travaillistes et que c'est dans les bastions travaillistes des villes ouvrières que ce transfert de voix est le plus marqué. A Birmingham, par exemple, deuxième agglomération du pays et grand centre métallurgique, les travaillistes cèdent cinq sièges aux libéraux-démocrates et perdent du même coup la majorité qu'ils détenaient au conseil municipal depuis vingt ans. Dans les anciens bastions miniers du nord de l'Angleterre, les résultats travaillistes tournent même à la déroute: à Chesterfield, ils doivent abandonner 16 sièges aux libéraux-démocrates, et 15 à Durham.
En revanche, le Parti Conservateur, dont la politique vis-à-vis de la guerre ne se distinguait en rien de celle de Blair, conserve le même score de 34% qu'il avait déjà fait en 1999. Et s'il en profite pour gagner 566 sièges de conseillers supplémentaires, alors que les libéraux-démocrates ne progressent que de 193 sièges, c'est uniquement grâce aux "vertus" du scrutin majoritaire à un tour et à la dégringolade des voix travaillistes.
Avant ces élections, les "stratèges" du Parti Travailliste prédisaient que la victoire rapide remportée par la coalition anglo-américaine en Irak suffirait à rallier à posteriori le soutien d'une grande partie des opposants à la guerre dans l'électorat travailliste. Certains avaient même prédit à Blair un "effet Malouines", c'est-à-dire une remontée des scores travaillistes, analogue à celle qu'avait obtenue le Parti Conservateur sous Thatcher, lors des élections législatives de 1983, au lendemain de la guerre des Malouines.
Eh bien, les élections du 1er mai ont prouvé que ces "stratèges", qui ont tendance à considérer l'électorat populaire comme des marionnettes qu'ils peuvent manipuler à volonté, se sont tout bonnement trompés.
En réalité, toute une partie des adhérents et sympathisants travaillistes qui font habituellement campagne sur le terrain en période électorale ont tout simplement "fait grève" cette fois-ci. Au point que, contrairement à la tradition, l'appareil travailliste n'a même pas réussi à trouver de candidats pour des centaines de sièges situés dans des bastions conservateurs. Quant aux électeurs travaillistes, de toute évidence bon nombre d'entre eux n'ont pas oublié l'arrogance et le mépris avec lequel Blair a traité l'indignation qu'ils avaient exprimée face aux menaces contre l'Irak. Et le 1er mai, parce qu'ils ne voyaient pas d'autre moyen de censurer Blair, ils ont voté pour un parti dont la politique ne vaut pas mieux que celle de Blair mais qui se permet un peu de démagogie parce qu'il est loin du pouvoir.
Blair, pour sa part, s'est bien gardé de commenter les résultats du scrutin du 1er mai. Il a laissé ce soin à ses ministres, qui ont eu tôt fait d'expliquer que les déboires de leur parti devaient être mis au compte du "vote musulman"! L'excuse est d'autant plus scandaleuse qu'elle vise à flatter les préjugés racistes et la bigoterie, en faisant porter le blâme sur les seuls électeurs d'origine immigrée et en cherchant à réduire l'opposition à la politique de Blair à des motifs religieux.
Comme s'il fallait nécessairement fréquenter une mosquée pour être révolté par le bombardement des populations en Irak! Il est vrai qu'après tous les mensonges dont il a abreuvé l'opinion publique britannique pour justifier sa sale guerre, Blair n'en est plus à un près.