Faire du 13 mai une démonstration de force du monde du travail08/05/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/05/une1814.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Faire du 13 mai une démonstration de force du monde du travail

Cette semaine, le ministre du Travail Fillon présente au gouvernement ce qu'il appelle la "réforme des retraites". Cette prétendue réforme est une attaque grave contre les retraités d'aujourd'hui et de demain, c'est-à-dire contre tous les salariés. Chirac et Raffarin veulent imposer au public ce que Balladur avait imposé au privé, 40 ans de cotisation, puis ils voudraient imposer 42 ans pour tous.

Dans une société rationnelle et humaine où les fruits du progrès sont répartis entre tous, le progrès de la productivité devrait conduire à un raccourcissement de la durée du travail. Dans cette organisation sociale pourrie, plus la productivité augmente du fait de l'aggravation du rythme de travail et des cadences, moins les travailleurs en profitent. Les fruits de la productivité sont empochés exclusivement par le grand patronat, par la classe riche.

Les artisans de ces attaques savent que, dans bien des secteurs, on ne peut pas allonger la durée du travail. Dans les grandes entreprises de l'automobile par exemple, les patrons eux-mêmes cherchent à se débarrasser, par le biais des préretraites, de leurs travailleurs les plus usés. Et ceux qui sont victimes de plans de licenciements à un âge où ils ne peuvent plus retrouver de travail n'auront pas le nombre d'annuités pour toucher une retraite pleine.

Mais c'est justement le but de l'opération! Faire cotiser plus longtemps pour une retraite plus réduite. Abaisser les salaires et diminuer les retraites, ce sont deux façons complémentaires pour le grand patronat et le gouvernement d'abaisser la part du monde du travail dans le revenu national.

Les gens qui nous gouvernent prétendent que la lutte des classes n'existe pas. Mais comment appeler autrement ce qu'ils font aux travailleurs? Comment appeler autrement le déremboursement d'un grand nombre de médicaments, alors que le gouvernement sait parfaitement qu'il pousse des centaines de milliers de personnes aux revenus les plus modestes à ne plus se soigner correctement?

La réduction des effectifs dans les services publics est encore une attaque contre les salariés, et doublement. D'abord parce que moins d'infirmières, moins d'enseignants, moins d'agents des transports publics, moins de facteurs, cela dégradera encore plus la qualité des services publics. Mais aussi parce que réduire les effectifs des services publics, c'est aggraver le chômage à un moment où le patronat procède à tour de bras à des licenciements collectifs, où des villes et des régions entières se transforment en zones sinistrées.

L'État, qui se refuse à empêcher les grandes entreprises de procéder à ces licenciements, devrait au moins créer lui-même des emplois. Mais l'État-patron, au contraire, en supprime.

Tous les travailleurs ont pu constater comment leur sort se dégrade au fil des ans. Cette dégradation est catastrophique dans certaines régions où les fermetures d'entreprises plongent une partie de la population dans la pauvreté.

Les attaques ont beau être diverses, tout dépend du rapport de forces global entre le patronat et le gouvernement, d'un côté, et l'ensemble du monde du travail, de l'autre. Nous ne pouvons pas laisser notre sort se dégrader. Les enseignants qui ne l'acceptent pas et qui le font savoir par des grèves et des manifestations ont raison et montrent la voie.

Les confédérations syndicales appellent à une journée de grève et de manifestations le 13 mai. Même si elles le font avec des préoccupations de boutique en commençant à brader certains des intérêts essentiels des travailleurs, il est vital que la journée du 13 mai soit massivement suivie. Car si le succès de la journée est vraiment perceptible par tous, il pourra convaincre qu'il faut aller au-delà des journées d'action symboliques.

Si une partie des travailleurs mis en mouvement le 13 mai continuaient le lendemain, ce serait une pression sur les confédérations pour qu'elles continuent. Et, pour le patronat et le gouvernement, ce serait le signe que quelque chose est en train de changer dans le monde du travail.

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