Vendredi 25 avril, se tenait le comité de groupe européen d'Alstom Power (grosses turbines à gaz et à vapeur). Le communiqué de presse d'Alstom, paru au moment de la tenue de cette réunion, annonçait donc 3000 suppressions d'emplois sur les 11000 que compte cette division.

Dans l'après-midi, les informations se précisaient, dont les 620 suppressions d'emplois en France sur 2300, toujours dans cette seule division "grosses turbines" alors que d'autres sont également touchées.

Pour ce qui concerne Rateau à La Courneuve, une information filtrait: 350 emplois seraient supprimés sur 531 et l'usine serait fermée. Après avoir à nouveau entendu cette information à la radio, l'équipe du soir, vingt-cinq travailleurs, se réunit et décidait d'arrêter le travail vers 20 h 30. Pas question de faire comme si de rien n'était et de travailler sur les turbines en cours. Et dans la soirée nous votions de nous retrouver lundi 28 au matin pour accueillir les travailleurs des Bureaux et de la normale pour discuter avec eux, les informer car ils avaient quitté l'entreprise avant les dernières informations du vendredi, les convaincre de ne pas se mettre au travail dans ces conditions.

Ainsi fut fait: malgré notre petit nombre, cela fut efficace et ce jour-là, c'est à un peu plus de 220 que nous nous retrouvions pour une assemblée d'information appelée par la CGT. Le syndicat confirma toutes les informations que nous avions déjà, mais tint à dire que la fermeture de Rateau, et donc les 350 licenciements, n'était qu'une hypothèse parmi d'autres, la direction disant qu'elle n'avait pas encore tranché.

C'est effectivement ce discours que tient la direction depuis trois semaines, ajoutant par l'intermédiaire de sa maîtrise: "Il faut finir les affaires en cours, rien n'est tranché pour l'avenir"... C'est cette même ambiguïté qu'elle a maintenue lors d'une réunion avec les syndicats lundi 28 avril en fin de matinée. Le directeur et son chef du personnel, massivement entourés dans la cour, ne cessaient de répéter que les bruits les plus fous avaient couru dans les médias. Mais quand il leur fut demandé de démentir ces bruits, de certifier que Rateau ne fermerait pas, ils nous répondirent qu'il n'était pas question de démentir quoi que ce soit. Alors?

Alors nous avons toutes les raisons de ne pas faire confiance à la direction. Elle veut simplement que nous finissions son boulot avant de nous mettre dehors!

Une partie d'entre nous est décidée, au contraire, à ne pas la laisser mener ses projets à bien et elle a vu qu'il était possible de rallier, pour cela, le plus grand nombre.