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Leur société
La Poste : Encore moins de service public en milieu rural
Au nom de la rentabilité, La Poste prévoit de fermer des milliers de bureaux, 5000 sur 17000 en deux ans, selon le syndicat FO. Certains seraient remplacés par des services réduits chez un commerçant, d'autres par une agence postale aux frais des habitants de la commune, tant que ceux-ci en supportent la charge. Une telle politique n'est pas nouvelle, mais le gouvernement entend Iui donner un coup d'accélérateur.
Cela fait déjà des années que La Poste ne veut plus entendre parler d'usagers, mais seulement de "clients": les petits, qui ne sont vraiment pas intéressants, et quelques grosses entreprises, qu'elle bichonne. Et maintenant, c'est l'expression "bureau de poste" qui est en passe de devenir tabou: il faudrait dire "point de contact"! La différence, c'est que La Poste inclut dans ses fameux "points de contact" les annexes des bureaux de poste, les buralistes qui font office de bureau de poste rural, et aussi les agences postales communales. L'objectif, c'est de garder des bureaux de poste uniquement là où ils sont "rentables". Et la direction montre du doigt 6 300 bureaux (37% du total) qui ne récoltent que 12% de l'argent déposé sur les comptes chèques postaux ou dans les livrets de caisse d'épargne et ne représentent que 8% du total des ventes des guichets. Pour La Poste, il n'est pas question d' apprécier le service rendu, mais de mesurer le "surcoût". Et tant pis si ces bureaux de poste sont, avec l'école et quelques autres services publics, déterminants pour que la population puisse continuer à vivre dans la commune.
Pour prouver la "non-rentabilité" d'un bureau de poste, La Poste commence par réduire les horaires d'ouverture du bureau, ce qui tend naturellement à écarter une partie des usagers qui ne peut plus s'y rendre. Ensuite, elle transforme le bureau tenu par un receveur en "bureau annexe". Ce qui implique que, contrairement au receveur, l'agent qui tient le bureau n'est pas remplacé lorsqu'il est absent, malade ou en congé. Si bien que le bureau annexe reste ainsi fermé plusieurs jours, ce qui, outre la gêne sur le moment, a pour effet de détourner encore un peu plus les gens.
L'étape suivante consiste à fermer le bureau de poste. Si celui qui en avait la charge était un salarié avec un contrat à durée déterminée, et de seulement quelques heures par jour, comme il en existe en proportion croissante à La Poste, elle le licencie sans aucune formalité: il lui suffit de ne pas renouveler le contrat. Dans certaines communes, La Poste demande alors à un commerçant d'effectuer certaines tâches comme la vente des timbres (et surtout des "produits" plus chers tels que les prêt-à-poster) moyennant une commission modeste, en général 130 euros par mois. Dans d'autres endroits, La Poste exerce un véritable chantage auprès de la municipalité: soit le bureau ferme purement et simplement, soit le Conseil municipal accepte qu' il soit transformé en "agence postale communale" en prenant en charge les locaux, étant entendu qu'aucun postier ne fera plus le travail du guichet. Pour tenter de faire avaler la pilule, La Poste assure le salaire de l'employé communal pendant trois ans. Mais ensuite, l'essentiel de la charge de personnel reposera sur la commune, en plus de celle du local. La charge pouvant être fort lourde pour les communes, ce seront peut-être elles qui seront amenées à fermer le bureau. La Poste aura réussi à faire endosser la responsabilité de la fermeture à la commune.
Heureusement, une telle politique rencontre l'opposition des salariés de La Poste et des habitants qui la refusent. Le mensuel Que Choisir? cite un village de Haute-Saône de 360 habitants, Fouvent-Saint-Andoche, qui est parvenu à maintenir son bureau. Avec le soutien des habitants, le Conseil municipal a refusé de reprendre le bureau et, au bout de près d'un an de lutte et de tractations, La Poste a fini par renoncer à fermer, en restreignant cependant les jours d'ouverture.
Et ce n'est qu'un exemple. Cette politique mériterait une riposte d'ensemble. Tandis qu'en ville les queues au guichet s'allongent, dans bien des petites communes le service public disparaît, avec partout une aggravation des conditions de travail et des restrictions d'emplois qui augmentent encore le chômage.