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Dans le monde
Irak : "mourir pour les industriels et les banquiers"
Alors que l'on voit chaque jour les images d'Irakiens mutilés, les représentants des grandes puissances ne se gênent pas pour dire crûment que l'Irak est désormais un gâteau à partager entre leurs trusts respectifs.
Les USA ont déjà commencé dans les faits à mettre la main sur les marchés de reconstruction et d'aide humanitaire. L'Usaid, l'organisme qui contrôle l'attribution de ces marchés, les a tous réservés à des firmes américaines, qu'il s'agisse de réparer les installations pétrolières ou de remettre en état et de gérer le port d'Oum Quasr. C'est cette politique que l'ex-conseiller du secrétaire d'État américain à la Défense, Richard Perle, avait annoncée avec cynisme en déclarant qu'il n'y avait aucune raison que ceux qui "n'ont pas adhéré au club" des envahisseurs, soient invités au "dîner du club" -c'est-à-dire à la distribution des contrats de la reconstruction.
Du coup, les impérialismes de seconde zone, européens en particulier, en sont réduits à ronger leur frein. Les alliés de Bush ne sont guère mieux traités d'ailleurs. La Grande-Bretagne, en particulier, a pu constater que la carte du club ne donnait pas pour autant accès au repas. Comprenant qu'elles n'auraient au mieux que quelques miettes dans le dispositif mis en place, les firmes britanniques se sont repliées sur une position plus conforme au rapport des forces, celle de sous-traitantes des entreprises américaines.
Mais, du coup, les puissances européennes, qu'elles soient alliées de Bush comme la Grande-Bretagne ou qu'elles aient fait mine de s'opposer à sa politique, comme la France et l'Allemagne, se rejoignent aujourd'hui pour réclamer que ce soit l'ONU et non les USA qui assume la direction des choses dans l'Irak de l'après-guerre. Car elles espèrent bien qu'une telle occupation "multilatérale" de l'Irak, dûment camouflée sous des prétextes humanitaires, conduise à une répartition plus "équitable" du butin irakien -ce qui n'est d'ailleurs même pas certain.
Quant à Dominique de Villepin, il a tenu à monter au créneau pour défendre les intérêts des entreprises françaises face à Richard Perle, en s'indignant vertueusement de ce que "l'Irak puisse être une sorte d'Eldorado, un gâteau que les États peuvent se partager"-indignation toute hypocrite que suffiraient sans doute à faire taire quelques miettes du dit "gâteau" au profit du patronat français.
En attendant leur part hypothétique du gâteau irakien, les entreprises françaises cherchent à capitaliser l'accueil favorable reçu par les prises de position chiraquiennes dans certaines capitales arabes-et n'était-ce pas là leur objectif, d'ailleurs?
C'est ainsi que le président UMP de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, Patrick Ollier, vient d'être envoyé en Libye par Chirac pour y rencontrer Khadhafi. Il était accompagné de représentants d'une dizaine de grands groupes comme Total, Accor, Sopexa, Vinci, France-Céréales. Ils s'agissait surtout de parler affaires, et en particulier du programme de développement des infrastructures libyennes estimé à 35 milliards d'euros, dont 6 milliards pour le seul secteur pétrolier.
Les vautours du capital se précipitent déjà sur la région. Quant aux Irakiens qui continuent à se faire massacrer au nom de la "démocratie" dans le déchaînement de barbarie meurtrière que les pays riches ont déclenché contre leur pays, ou aux soldats occidentaux qui risquent leur vie, parce que c'est leur "boulot" comme disait l'un d'entre eux à un journaliste, ce sont autant de vies humaines gâchées à jamais au seul bénéfice des trusts et des banquiers.