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Dans le monde
Tchétchénie : La farce sinistre du référendum
Les autorités russes pavoisent: après plus de trois ans d'une seconde guerre de Tchétchénie, les électeurs tchétchènes sont censés avoir approuvé le rattachement à la Fédération de Russie de leur petite république sécessionniste. Poutine a arraché un "oui" aux Tchétchènes, exactement comme ses mercenaires le font pour les racketter en "temps normal": en leur mettant un pistolet sur la tempe.
Ce référendum n'a, bien sûr, été qu'une sinistre farce. Poutine aurait tout aussi bien pu annoncer 100% de "oui" (et pourquoi pas 120%, au lieu du "modeste" chiffre de 96% qu'il proclame). Il en avait les moyens, tous les moyens. Qu'on en juge.
Lors du recensement de la population de la Fédération effectué l'automne dernier, les autorités tchétchènes mises en place par le Kremlin (pour contrer celles, élues en 1996, qui sont indépendantistes) ont annoncé un million d'habitants, alors qu'elles en déclaraient jusque-là deux fois moins, la moitié de la population ayant fui pour échapper aux horreurs de la guerre.
Mais, en doublant le chiffre des habitants, donc des électeurs, les autorités prorusses se donnaient une confortable marge pour bourrer les urnes. Pour plus de sécurité, elles ont aussi usé d'intimidations et manoeuvres en tout genre: chantage à la distribution de vivres et d'aide par les autorités aux réfugiés ayant tout perdu; rapatriement forcé de la plupart de ceux qui se trouvaient en Ingouchie et qu'on a établis dans des camps "sécurisés" par l'armée; menaces de représailles collectives contre les villages qui ne voteraient pas "comme il faut". C'est un "argument électoral" persuasif quand, nuit après nuit, des soldats russes masqués ont carte blanche pour enlever des partisans, réels ou supposés, de l'indépendance. Systématiquement torturés, ils ne sont rendus à leur famille que contre rançon et estropiés, dans le meilleur des cas. Ou ils ne réapparaissent jamais, comme l'ont rappelé avec courage quelques mères et épouses de disparus qui manifestaient, le jour du scrutin, dans une capitale tchétchène en ruines et occupée militairement.
Si la presse d'ici n'a guère parlé de ce référendum, ce n'est pas qu'elle aurait trop à faire à couvrir la guerre en Irak. C'est que le monde dit civilisé n'allait pas reprocher à Poutine cette mise en scène de la sale guerre qu'il mène depuis plus de trois ans à tout un peuple, alors que l'Occident se livre au même type d'opération en Irak.
Le droit des peuples, les dirigeants américains, mais aussi français et autres, le foulent aux pieds quand leurs intérêts -en fait, ceux de leurs trusts- le commandent. Et ils s'en moquent ni plus ni moins en Tchétchénie qu'en Côte-d'Ivoire, en Irak ou ailleurs.