"Réforme de la Sécurité sociale" : De nouvelles attaques en projet27/03/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/03/une1808.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

"Réforme de la Sécurité sociale" : De nouvelles attaques en projet

Jean-François Chadelat, le président du fonds CMU (Couverture Maladie Universelle), vient de remettre le rapport que le ministre de la Santé , Jean-François Mattei, lui avait demandé. Ce n'est qu'un projet, mais qui annonce clairement l'objectif de diminuer encore la part remboursée par la Sécurité sociale aux assurés sociaux, et sans doute d'introduire un début de privatisation.

Seul un "panier de soins" réduit serait désormais remboursé. Et le ministre envisage "une assurance personnelle obligatoire à géométrie variable... proposée aux assurés qui ne sont couverts que par la Sécurité sociale". Cela reviendrait à une augmentation des cotisations pour tous les travailleurs, ceux contraints de payer, en plus, une assurance obligatoire, comme tous les autres qui devraient faire face à l'augmentation des tarifs de leurs assurances complémentaires. Et le président de la Mutualité française, qui assure 7% du total des remboursements, annonçait à ce propos: "Si nous devions compenser le dépassement de l'objectif de dépenses voté par le Parlement (3,1 milliards d'euros pour la seule année 2002), il faudrait plus que doubler nos cotisations chaque année."

Mais le gouvernement vise encore un autre objectif, celui de faire bénéficier le privé de la manne que constitue le marché de la santé. Chadelat, qui fut responsable du département sur les nouveaux produits de santé de l'assureur Axa et qui participa à l'élaboration du plan Juppé en 1995, envisage dans son rapport de donner "plus de place au privé".

Derrière Jean-François Mattei ou Jean-François Chadelat, on voit bien dépasser les longues dents du patronat.

La "pédagogie" du ministre

À propos de l'augmentation des dépenses de santé, le ministre de la Santé s'est déclaré "persuadé, à condition de faire un peu de pédagogie, que les Français sont prêts à accroître leur prise en charge personnelle". Et il a ajouté que le "tout-gratuit n'est pas possible".

Mais c'est une façon mensongère de présenter les choses, car les salariés cotisent, pour bénéficier de remboursements de soins, ce n'est donc pas gratuit. Et, en ce qui concerne les remboursements, le "tout-gratuit" n'a quasiment jamais existé. Les soins ne sont remboursés à 100% que dans les cas de certaines maladies graves, et après accord d'un haut comité médical. Les maladies dont les soins sont remboursés à 100% sont au nombre de trente. En dehors de ces cas, pour les médicaments comme pour l'hospitalisation -puisque, depuis 1982, existe un forfait hospitalier, créé par la gauche-, tout le monde doit payer un "ticket modérateur", c'est-à-dire une participation aux dépenses de soins. Cette participation est importante puisqu'elle s'élève à 30% du prix d'une visite chez un médecin, de 35 à 65% du prix d'un médicament, à 40% des frais pour analyses médicales, et à 20% des frais d'hospitalisation. Pour faire face à ces dépenses, la majorité des salariés cotisent en plus à une caisse complémentaire. Mais bien des travailleurs n'ont pas les moyens de le faire.

Depuis des années, la politique des gouvernements successifs, de gauche comme de droite, consiste à diminuer la part remboursée par la Sécurité sociale, si bien que se faire soigner les dents ou changer de lunettes devient un luxe pour beaucoup, dans les classes populaires. Elle consiste également à réduire les budgets des hôpitaux. Ainsi des maternités ferment depuis des années, à tel point que de 1369 en 1975 leur nombre est passé à 694 en 2001: moitié moins!

Pourtant les moyens existent

Les gouvernements ont toujours mis en avant l'augmentation "intolérable" des dépenses de santé, avec comme prétendue preuve l'augmentation du déficit de la Sécurité sociale. Jean-François Mattei entonne la même rengaine, mettant en avant ce déficit de la Sécurité sociale qui serait de 7 milliards d'euros à la fin de l'année 2003. "Cette évolution inéluctable (de l'augmentation des dépenses de santé et du déficit) contraint à regarder en face la nécessité d'accroître la part de notre revenu national consacrée à la santé et à nous interroger sur le niveau que doit atteindre le financement solidaire dans cette contribution. Parallèlement, nous devons nous interroger sur la pertinence des dépenses."

Cette augmentation des dépenses de santé est normale, dans une société censée être en progrès et où l'espérance de vie augmente. Il est donc normal que la part du revenu que la société y consacre soit en augmentation.

Ce ne devrait pas être un problème insoluble, car la société dispose de moyens suffisants pour y faire face. Seulement la société est privée de ces moyens, car les patrons accaparent une grande partie de cette richesse.

Pour ne s'en tenir qu'à la Sécurité sociale, ses recettes seraient bien plus importantes, si le chômage et les bas salaires ne "plombaient" pas les cotisations, tant salariales que patronales. Et par-dessus le marché les exonérations de cotisations dont bénéficient les patrons représentent 19,4 milliards d'euros, soit près de trois fois le déficit annoncé pour 2003.

Le gouvernement a annoncé qu'après le "chantier" des retraites, c'est celui de la santé qui allait s'ouvrir. C'est la fin de la Sécurité sociale qui est programmée.

À moins que, comme pour les retraites, les travailleurs se mobilisent et empêchent le mauvais coup qu'on leur prépare.

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