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Dans les entreprises
Matra : Lagardère, un "patron voyou" bien de chez nous
Lorsque Métaleurop avait annoncé la fermeture de son usine du Pas-de-Calais, il y a un peu plus d'un mois, Chirac n'avait pas eu de mots assez durs envers ces "patrons voyous". Aujourd'hui alors que Matra jette à la rue un millier de travailleurs à Romorantin, on n'entend plus dans la bouche du chef de l'État et de ses lieutenants au gouvernement de tels qualificatifs.
S'ils voulaient entamer la chasse à ces voyous de patrons, le trust Lagardère, auquel appartient Matra-Automobile, serait une cible bien plus accessible que l'insaisissable conglomérat international dont Métaleurop était la filiale. Pour parvenir aux comptes en banque de ceux à qui profite le crime, nul besoin cette fois de démêler l'écheveau de multiples filiales en semi-faillite, basées dans autant de paradis fiscaux et juridiques. Lagardère est un des fleurons de "notre" capitalisme national. Il tire une bonne partie de ses profits de liens étroits avec l'État, notamment dans le domaine de l'industrie d'armement et de l'aéronautique. Il contrôle une part de l'édition et des médias. Avec ce patron si proche des sphères du pouvoir, Chirac a baissé d'un ton. Pourtant, c'est peu dire que lui aussi s'est conduit comme un voyou, c'est-à-dire comme n'importe lequel des patrons, en mettant à la rue un millier de salariés.
Leur travail lui avait rapporté, lorsqu'ils fabriquaient "l'Espace", 700 millions d'euros, soit dix fois son investissement initial. Quand les chiffres de vente de "l'Espace" crevaient les plafonds, Lagardère empochait, partageant avec Renault. Mais maintenant que le véhicule qui lui a succédé, "l'Avantime", serait un échec commercial, ce sont les salariés qui trinquent!
On pourrait d'ailleurs employer des qualificatifs semblables pour la direction de Renault, dont l'actionnaire principal est toujours l'État. Renault a aussi engrangé les bénéfices de "l'Espace" avant de laisser tomber les ouvriers de Romorantin. Alors, Lagardère se fendra peut être d'un chèque pour les salariés qu'il jette à la rue. Renault a même promis de reprendre dans ses usines tous les salariés de Matra-Romorantin, à condition qu'ils soient prêts à déménager. Mais cela ne changera rien au fait que la vie d'un millier de travailleurs aura été ruinée et une région entière sinistrée, pour que soient assurés les profits.
Ce sont les mêmes méthodes qu'à Métaleurop, celles du capitalisme.