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Dans le monde
Portugal : Grève générale
La grève générale appelée le mardi 10 décembre par la CGTP, la principale confédération syndicale portugaise, animée par les militants du Parti Communiste Portugais (PCP), a été un succès. Dans le transport aérien, les chemins de fer (qui avaient cessé le travail la veille à midi), le textile, la métallurgie et la chaussure, près de 90 % des salariés ont participé au mouvement. Ce succès a même poussé l'UGT, la confédération contrôlée par le Parti Socialiste (PS) et par la droite, à déclarer que, si le gouvernement ne renonçait pas à ses projets les plus scandaleux, elle pourrait la prochaine fois se joindre à la CGTP. Lors de cette grève, la CGTP a refusé un service minimum dans les transports et le secrétaire d'État au Travail l'a accusée de " terrorisme social ".
Le gouvernement de droite issu des élections de mars dernier mène en effet une attaque en règle contre les travailleurs, politique qui est la continuation de celle du précédent gouvernement socialiste. En ligne de mire : le code du travail, les retraites, la Sécurité sociale, la Santé et l'Éducation nationale. Résumant tout cela, un patron déclarait qu'il fallait en finir avec ces " conquêtes d'Avril ", Avril symbolisant la mobilisation et l'organisation de la classe ouvrière à la suite du renversement de la dictature salazariste, le 25 avril 1974.
Avec la grève du 10 décembre, la CGTP voulait s'opposer à la remise en cause du code du travail. Le gouvernement propose en effet que, si les négociations syndicats-patronat n'aboutissaient pas à la signature d'une convention collective de branche, cette convention soit remplacée par des contrats individuels. Il veut en même temps porter de trois à six ans la durée légale des contrats temporaires (52 % sont déjà prolongés illégalement par les patrons) ; ne plus avoir à réintégrer un travailleur licencié abusivement, dans le cas d'une petite entreprise (un quart des salariés portugais) ; augmenter la période d'essai de deux à six mois ; imposer la mobilité des affectations dans tout le pays, au gré du patron ; instaurer l'annualisation des horaires et la flexibilité, jusqu'à 12 heures par jour, 60 heures par semaine ; réduire la partie du temps de travail de nuit, qui donne droit au paiement d'une prime, entre 22 h et 7 h (jusqu'ici : 20 h et 8 h) ; effectuer des déclassifications ; élargir les causes légales de licenciement ; le droit de suspendre les contrats de travail pour assurer la " viabilité de l'entreprise " ; instaurer un service minimum antigrève ; etc.
Le gouvernement projette d'autres mesures antiouvrières, comme la privatisation de la Sécurité sociale, des hôpitaux et des centres de santé (cela intéresse les groupes d'assurances) ; la réduction du budget de l'Education nationale ; des coupes dans les investissements de l'État, ce qui entraînera des réductions de personnel ; enfin, cadeau direct aux patrons, la réduction des impôts sur les plus-values.
Ces attaques gouvernementales ont amené des ripostes cet automne, qui ont commencé par une manifestation nationale des personnels des crèches et des écoles maternelles, suivie de grèves et de manifestations les 16 et 30 octobre, d'une grève générale massive de la fonction publique le 14 novembre et d'une journée de lutte le 30 novembre. Les directions syndicales semblent décidées à ne pas en rester là. Celle des cheminots a déclaré à la télévision que la grève du 10 n'était que le début d'une lutte contre les projets de remise en cause des droits des travailleurs et des retraités.
Les travailleurs qui ont répondu présent jusqu'ici étaient essentiellement des salariés de services publics. Il faut espérer qu'ils continuent à pousser à l'action les dirigeants syndicaux et qu'ils arrivent à entraîner l'ensemble des salariés du privé, qui ont les mêmes revendications.