France Télécom : Un " plan de sauvetage " dirigé contre le personnel11/12/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/12/une1793.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

France Télécom : Un " plan de sauvetage " dirigé contre le personnel

La direction de France Télécom a présenté un " plan de sauvetage " de son entreprise par lequel elle compte faire payer la facture aux travailleurs et aux contribuables ; aux premiers par la réduction des effectifs, aux seconds en les contraignant à mettre la main à la poche pour boucher des trous financiers considérables.

Pour dénoncer les projets de la direction et appeler à la mobilisation, les militants de Lutte Ouvrière ont distribué le tract ci-dessous dans de nombreux centres France Télécom.

Le " plan de sauvetage " de France Télécom en est peut-être un pour certains, mais pas pour nous, les salariés de l'entreprise. Fonctionnaires ou pas fonctionnaires, c'est à nous tous que la direction et le gouvernement prétendent faire payer la note.

Ce plan de " sauvetage " là est uniquement au profit des actionnaires - des gros actionnaires s'entend, les groupes financiers qui ont déjà mis le grappin sur France Télécom et qui en veulent encore plus. Le journal Le Monde a titré " Le gouvernement sauve France Télécom pour mieux la privatiser ". Tel est en effet l'objectif.

Depuis l'époque où les télécoms étaient une administration de l'État, les gouvernements successifs, et ceux dits de gauche au moins autant que ceux de droite, ont tous eu pour objectif d'offrir les profits produits par notre travail aux gros capitalistes privés, en en faisant d'abord un " établissement public ", puis une société anonyme cotée en Bourse à Paris et New York - car France Télécom était et demeure une entreprise très profitable. Cherchant à faire passer la pilule, le gouvernement Jospin parlait d'" ouverture du capital ", expression hypocrite. Aujourd'hui, la privatisation pure et simple est clairement affichée.

Et pour " mieux privatiser ", le gouvernement se charge de rendre le gâteau plus appétissant pour les capitalistes aux dents longues qui le convoitent.

Dans l'immédiat, l'État prend à sa charge la plus grosse partie de l'échéance la plus urgente, soit 9 milliards d'euros. Ce cadeau se fera donc sur le dos du contribuable.

C'est un scandale, mais le pire volet de l'affaire, c'est l'attaque ouverte lancée simultanément contre le personnel. Réduction des coûts, austérité sont à l'ordre du jour, et cela veut dire avant tout réduction massive des effectifs.

Ces réductions d'effectifs envisagées vont bien au-delà des 20 000 départs en préretraite prévus pour les trois ans qui viennent.

Le PDG affirme aujourd'hui qu'il n'y aura pas de " plan social ", mais... on assiste déjà depuis un moment au non-remplacement des contrats CDD, d'intérimaires ou de vacataires, en particulier dans les filiales Orange, Wanadoo ou autres. Mercredi 4 décembre, Orange annonçait 2 000 suppressions d'emplois. Téléperformance, qui sous-traite dans ses centres d'appels le trafic de Wanadoo ou d'Orange, annonce des restructurations.

Thierry Breton assure que les fonctionnaires ne seront pas licenciés. Bien sûr, pour eux, plus de 100 000 fonctionnaires, c'est un gros morceau. Mais les dirigeants de France Télécom ne cachent pas leur désir de rendre ce personnel le plus " flexible " possible, et nous savons ce que cela signifie. Depuis des années, il ne s'est pas passé de mois sans que, dans tous les services, des agents n'aient été confrontés aux restructurations, aux mobilités forcées, à devoir reconstruire leur vie. Et chaque fois, c'était des suppressions d'emplois à la clé.

On nous dit encore que le " redéploiement " serait celui de volontaires, mais on sait aussi ce que veut dire " volontariat " quand les agents voient leurs postes disparaître. D'autant que, à force de supprimer des emplois dans tous les services, la possibilité de retrouver un poste à l'intérieur de France Télécom devient de plus en plus aléatoire.

Aller dans d'autres administrations - se faire gardiens de prison, par exemple ? Vraiment pas tentant ! France Télécom nous envoie des e-mails contenant des propositions venant surtout du ministère de l'Intérieur ou de l'Éducation nationale : de toute façon, cela ne peut concerner que quelques centaines d'entre nous.

Alors, le transfert dont il est question, du gros des effectifs fonctionnaires à l'établissement public ERAP, ressemble plutôt à une opération " dernier arrêt avant la sortie ", une sorte de " sas " destiné à résorber à terme l'effectif à statut de fonctionnaire.

Toute l'affaire est une vaste escroquerie. Car, enfin, pourquoi y a-t-il cette urgence, pourquoi France Télécom s'est-elle surendettée ?

Le ministère ose affirmer que le fait que l'État soit majoritaire dans le capital de l'entreprise serait une cause de la crise financière actuelle.

C'est une contre-vérité. C'est au contraire depuis que les gouvernants ont livré France Télécom de plus en plus au secteur privé capitaliste, en réduisant le service public rendu par les télécoms à une peau de chagrin, que leurs finances ont été sérieusement mises à mal. Ce n'est pas le service public qui coûte cher, ce sont la Bourse et la spéculation capitaliste.

Le surendettement actuel est, en réalité, dû au fait que, à l'époque de l'euphorie de la Bourse, France Télécom comme les autres trusts de la téléphonie s'est lancée dans une politique d'acquisitions tout azimut à travers le monde, en vue de profiter des marchés nationaux auxquels ces acquisitions devaient lui donner accès. Et cela en pleine spéculation effrénée, à laquelle France Télécom a participé en spéculant sur le marché encore inexistant, hypothétique, que devaient offrir les licences UMTS. Et il faut bien dire que, si cette course débridée au profit facile débouche sur un endettement colossal pour l'entreprise, pourtant, pour les gros actionnaires, l'argent n'a pas été jeté par les fenêtres : au contraire, il est allé grossir leurs comptes bancaires !

Nous, les salariés, ne sommes absolument pour rien dans cet endettement. Des capitalistes s'en sont mis plein les poches, et on leur prépare de nouveaux cadeaux, mais quant à nous, les dizaines de milliards d'euros partis dans cette affaire, nous n'en avons pas vu la couleur. Même pas ceux, parmi nous, qui ont acquis quelques malheureuses actions France Télécom : pour eux, ça a été surtout le miroir aux alouettes.

Ce n'est pas aux salariés de payer ! Nous, c'est notre avenir qui est menacé, et c'est une question vitale.

Tout ce gâchis est révoltant. Il faut y mettre un coup d'arrêt, et il n'y a que les salariés, les travailleurs, qui eux font fonctionner cette grosse machine qu'est France Télécom, qui le peuvent. Ce n'est pas l'État actionnaire qui va nous protéger, pas plus qu'il ne nous a protégés précédemment, que ce soit avec 60, 40 ou 50 % de parts du capital : c'est lui qui mène l'attaque contre nous.

Il va falloir nous battre, et tous ensemble, sans nous laisser diviser, quels que soient notre statut, notre catégorie, ou notre lieu de travail, CONTRE TOUTE SUPPRESSION D'EFFECTIF, CONTRE TOUT RECUL SUR LES CONDITIONS DE TRAVAIL, CONTRE TOUTE MOBILITÉ IMPOSÉE.

Notre participation nombreuse à la grève du 26 novembre est un bon premier pas. Il ne faut pas s'arrêter à cette journée, mais s'appuyer sur son résultat pour amplifier la mobilisation.

Tract Lutte Ouvrière
France Télécom
du 9 décembre 2002

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