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Dans les entreprises
EDF-GDF (Retraites) : La capitulation syndicale
Raffarin, Fillon, Mer et consorts peuvent être satisfaits : les dirigeants syndicaux d'EDF-GDF, en particulier ceux de la CGT, viennent d'accepter la première étape d'un accord sur les retraites, qui donne à peu près complètement satisfaction à l'État et aux patrons.
Certes il ne s'agit pour le moment que d'un " relevé de conclusions ", pas encore d'un véritable accord, nuance. Mais les dirigeants fédéraux - excepté FO qui a refusé de négocier - ne le rejettent pas, et comptent le soumettre au personnel, ce qui signifie qu'ils l'acceptent.
Les retraites d'EDF-GDF constituent jusqu'à présent un problème pour le gouvernement. En effet, le régime particulier des retraites des électriciens et gaziers le gênait pour entamer la négociation générale qu'il envisage prochainement sur les retraites des fonctionnaires, dans le but de passer de 37,5 années à 40 ans de cotisations.
La fédération CGT de l'énergie - et pas seulement elle bien sûr - vient donc de lui ouvrir la voie.
Sous prétexte de concurrence à l'échelle européenne et de la prétendue nécessité d'ouvrir le capital d'EDF et GDF, ces deux sociétés ont décidé de se débarrasser de ce qu'elles appellent le " fardeau des retraites ". Jusqu'à présent en effet EDF et GDF financent l'intégralité des retraites du personnel qui, lui, cotise à 7,85 %.
EDF et GDF veulent que les retraites soient payées par une caisse séparée " adossée ", selon leurs termes, au régime général de la Sécurité sociale. Et c'est, pour l'essentiel, ce qu'il y a dans le " relevé de conclusions ".
Qu'est-ce que cela changerait pour le personnel ? D'une part le taux de cotisation passerait de 7,85 % aux alentours de 12 %, soit l'équivalent d'une baisse des salaires de 4 %. Puis, lorsque l'ensemble des fonctionnaires passeraient à 40 ans de cotisation, si le gouvernement parvient à accomplir ce qu'il souhaite, les électriciens et gaziers connaîtraient le même sort. Ajoutons que le statut d'EDF et GDF serait modifié, ce qui ouvre la porte à d'autres modifications futures, sur les licenciements par exemple.
En outre, le fait qu'EDF et GDF se débarrassent ainsi des retraites - moyennant une soulte de quelques milliards versée à la future caisse - faciliterait grandement l'ouverture du capital. Car les capitalistes qui lorgnent sur EDF et GDF ne veulent pas s'encombrer des retraites.
Lors de la manifestation des électriciens et gaziers du 3 octobre, qui fut un grand succès, les syndicats avaient axé leurs revendications - et quasiment toutes leurs banderoles - sur la " défense du service public ". La question des retraites avait été quasiment évacuée.
Et parallèlement les dirigeants fédéraux ont aussitôt commencé à négocier sur les retraites avec EDF, GDF et des patrons des IEG (Industries électriques et gazières) lesquels représentent assez peu de chose, mais représentent surtout... le patronat.
Le personnel n'a jamais mandaté les directions syndicales pour de telles négociations. D'ailleurs dès le début la fédération FO est partie en claquant la porte. Les autres auraient pu en faire autant. Puis les négociations se sont poursuivies durant quelques semaines, dans le plus grand secret vis-à-vis des travailleurs.
De temps en temps des articles de journaux rendaient compte des discussions et servaient en réalité à préparer petit à petit l'opinion sur la capitulation syndicale.
Les dirigeants fédéraux ont été d'une hypocrisie parfaite : ils ont parlé, au début de " pérenniser le régime des retraites " en se gardant bien de dire qu'ils allaient commencer par le saboter, et qu'ils pérenniseraient (et encore ce n'est même pas sûr !) ce qui en resterait.
L'annonce de la capitulation syndicale a été reçue par le personnel comme une véritable douche froide. Dans les milieux syndicaux, très importants à EDF-GDF, c'est la consternation. Certains ne veulent pas croire ce qui est pourtant l'évidence. Certains parlent de déchirer leur carte syndicale. Certains envisageaient d'aller manifester... devant le siège de la fédération CGT de l'Énergie à Pantin.
Les dirigeants fédéraux voudraient conclure l'accord à la hussarde, avec consultation rapide et signature prévue au plus tard le 20 décembre.
Mais la partie n'est pas encore jouée car il n'est pas dit que le personnel entérine l'accord. C'est pourquoi on assiste à une véritable campagne de bourrage de crâne dans les médias. Ainsi le Parisien du 11 décembre, sous le titre " la réforme où tout le monde gagne ", commençait son article par ces lignes : " Heureux gaziers et électriciens de France qui n'ont pas de soucis à se faire pour leurs retraites... ". Gros mensonge, c'est tout le contraire, le personnel d'EDF-GDF n'avait pas de soucis jusqu'à présent, mais maintenant il aura de quoi s'en faire si l'accord passe !