Suisse : Lutte ou... référendum ?05/12/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/12/une1792.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Suisse : Lutte ou... référendum ?

En Suisse, suite à la manifestation qui avait rassemblé 10 000 salariés du bâtiment au mois de mars à Berne, aux grèves des mois de septembre et octobre et à la journée de grève du 4 novembre 2002 qui avait mobilisé plus de 15 000 ouvriers du bâtiment, le patronat du secteur est revenu en arrière et vient de signer, pour la deuxième fois, l'accord qui permettra aux ouvriers de la construction de partir en retraite à 60 ans en 2006.

Cela sera la moindre des choses, car quatre ouvriers du bâtiment sur dix sont invalides avant l'âge de la retraite et 20 % meurent avant 65 ans. Dorénavant, dès le premier juillet 2003, les travailleurs âgés de 63 et 64 ans pourront prendre leur retraite. En janvier 2004, ceux de 62 ans ; en 2005, ceux de 61 ans et en 2006 ceux de 60 ans. Leur pension se montera à environ 80 % du dernier salaire brut.

Malgré tout, cette modification ne coûtera pas grand-chose au patronat puisque l'accord prévoit un blocage des salaires en 2003 et une hausse des cotisations des salariés de 1 %. Par ailleurs, sur les 150 000 salariés de ce secteur, selon les syndicats, seulement 400 ouvriers travaillent encore sur les chantiers au-delà de 63 ans. Les autres sont morts, invalides ou ont quitté le travail plus tôt.

Reste que c'est toutefois un succès de la lutte, dans ce pays où l'âge légal de la retraite est 65 ans pour les hommes, 64 ans pour les femmes et où les milieux patronaux et gouvernementaux sont en train de discuter de repousser à 67 ans l'âge de la retraite pour toutes les catégories.

D'un autre côté, pour tenter de s'opposer à une remise en cause des droits au chômage par le gouvernement, les organisations syndicales ont soumis le 24 novembre au référendum le projet gouvernemental. Malheureusement celui-ci est passé avec 56,1 % des voix en sa faveur. Il prévoit désormais qu'il faut travailler 12 mois d'affilée au lieu de 6 pour avoir droit aux allocations chômage et que les chômeurs n'auront droit qu'à 400 jours d'indemnités au lieu de 520. Cela exclura un chômeur sur huit des droits au chômage, tous ceux qui font des " petits boulots " de quelques semaines ou quelques mois et en tout particulier les femmes.

Pour sa réforme de l'allocation chômage, le gouvernement avait mis le paquet. Le ministre de l'Économie, relayé par une foule de hauts fonctionnaires, a multiplié les réunions dans les entreprises, allant même jusqu'à distribuer des tracts pour dénoncer la loi actuelle comme un " oreiller à la paresse " ou " favorisant le tourisme social " de soi-disant chômeurs étrangers qui viendraient envahir le pays pour profiter des avantages sociaux suisses. Par ailleurs, le ministre a promis une baisse pour tous de 1 % du taux de cotisation chômage et la suppression de l'impôt de solidarité envers les chômeurs que payaient jusque-là les plus riches. Bref, en jouant des préjugés xénophobes, antichômeurs, et en promettant aux plus riches moins de taxes chômage pour tous et moins d'impôts en faveur des pauvres, il a réussi à faire passer ses attaques.

Bien évidemment le terrain du référendum était biaisé, car une grande partie des travailleurs en Suisse ne peuvent pas voter, étant frontaliers, saisonniers ou étrangers. Le terrain de la lutte a payé, même si c'est relatif, mais celui des urnes s'est révélé une impasse.

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