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Leur société
Sécurité sociale : Un déficit de soins qui se creuse
Dans une récente interview, Jean-François Mattéi, le ministre de la Santé, a affirmé qu'il fallait " sortir du tout-gratuit ". " La responsabilisation des patients ne peut se faire qu'à condition que toute la population ait les moyens de bénéficier d'une couverture complémentaire ", a-t-il ajouté.
Sortir du tout-gratuit ? Mattéi ne manque pas de culot. Le tout-gratuit, sauf pour les longues maladies, n'a jamais existé pour les médicaments, même s'il existait jusqu'à 1982 pour l'hospitalisation, supprimé par la gauche, qui instaura le forfait hospitalier. Depuis des années les gouvernements successifs, de gauche comme de droite, ont diminué les remboursements de médicaments. Quant à avoir des problèmes de vue ou de dents, mieux vaut l'éviter si on n'a pas un compte en banque un peu garni.
" Responsabiliser " les patients ? C'est la ritournelle des politiciens et des prétendus experts, qui cherchent à culpabiliser les malades et qui attribuent le déficit de la Sécurité sociale au fait qu'on se soignerait trop. C'est un mensonge éhonté. D'abord parce que le déficit de la Sécurité sociale, Régulièrement présenté comme ayant atteint un niveau intolérable, pourrait tout à fait être supporté par un pays riche comme la France. Ensuite, parce que ce déficit est beaucoup moins dû à des dépenses trop élevées - ce qu'on veut faire avaler à l'opinion - qu'à des recettes trop faibles. Le chômage, les bas salaires, et les multiples dégrèvements consentis au fil des ans au patronat sous prétexte de favoriser l'emploi, tout cela pèse dans le même sens : la diminution du montant des cotisations, donc des recettes. Et bien entendu, c'est à la population qu'on présente ensuite la note.
Mais il y a autre chose : c'est que les financiers, en particulier ceux liés aux compagnies d'assurance, lorgnent sur le fromage que représenterait l'assurance maladie, au cas où la Sécurité sociale s'en désengagerait, ne serait-ce que partiellement. Et derrière la campagne sur le déficit de la Sécurité sociale, et la nécessité de promouvoir des " couvertures complémentaires ", on voit poindre leurs longues dents.
Ce transfert d'une partie de l'assurance sociale au secteur privé se traduirait par une diminution des prestations et par des cotisations en hausse. Ces gens-là n'investissent pas par philanthropie, et ils feraient en sorte que leur mise leur rapporte. Quant à ceux qui n'auraient pas les moyens de cotiser à un régime complémentaire, ils devraient se contenter des services d'une Sécurité sociale de plus en plus réduite.
Le gouvernement n'a pas encore annoncé de mesures précises, mais il prépare l'opinion.