Sangatte : L'hypocrisie et le cynisme des pays riches21/11/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/11/une1790.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Sangatte : L'hypocrisie et le cynisme des pays riches

Depuis la fermeture du centre de Sangatte et l'évacuation de l'église de Calais, de nouveaux réfugiés continuent toujours d'affluer dans l'espoir de pouvoir passer en Angleterre. Ceux qui se sont faits refouler errent dans la ville à la recherche d'un abri loin des CRS, ou dorment dans les champs situés aux alentours. Quant aux 1800 réfugiés qui sont encore accueillis dans le centre de Sangatte, fermé à de nouveaux arrivants depuis le 5 novembre, ils ne savent pas ce qu'ils deviendront après sa fermeture définitive en avril 2003.

À ceux qui sont embarqués par les CRS, il est proposé d'être reconduits à la frontière ou de demander l'asile politique. Il s'agit d'une cruelle hypocrisie de plus, car ils n'ont aucune chance de l'obtenir. Le gouvernement ne cherche qu'à gagner du temps, avant de les expulser définitivement.

De toute façon, ce que veulent ces réfugiés, c'est rejoindre l'Angleterre, parce qu'ils pensent pouvoir y travailler et qu'ils y ont parfois déjà des amis ou de la famille qui pourraient les aider.

À droite bien sûr, mais à gauche aussi, les déclarations de politiciens se succèdent pour justifier, avec ou sans réserves, la fermeture du centre de réfugiés. Ainsi, le maire socialiste de Sangatte déclarait : " La période a été mal choisie étant donné les conditions climatiques. Mais si on n'arrête pas l'entrée des immigrés clandestins, le centre de Sangatte perdurera encore longtemps. De ce point de vue là le ministre de l'Intérieur a tenu les engagements qu'il avait pris lors de sa dernière visite ici. " Le maire PCF de Calais allait dans le même sens en disant : " Fermer Sangatte aussi vite n'était pas la solution. Néanmoins le gouvernement avait été clair sur ses intentions et l'on peut comprendre que la fermeture ait été avancée pour éviter l'afflux de toute l'Europe ". Quant au président de la Croix-Rouge française, Marc Gentilini, dans une interview au journal le Parisien, il se félicitait du " vrai plan " proposé, d'après lui, par le ministre de l'Intérieur, Sarkozy, en échange de la fermeture de Sangatte : " Les propositions du gouvernement sont les plus favorables qui aient jamais été faites en Europe pour des réfugiés économiques ou politiques ". De quelles " propositions favorables " veut-il parler ? S'agit-il des propositions de demande d'asile qui ne seront jamais satisfaites ou de l'arrivée de 500 CRS et gendarmes mobiles pour effectuer des contrôles, annoncée par le préfet du Pas-de-Calais ?

Toujours plus de police, toujours plus de barbelés, voilà la " solution " de ceux qui pensent qu'on " ne peut pas accueillir toute la misère du monde ", qui font le tri entre ceux qui sont des " clandestins " et " ceux qui désirent s'intégrer à l'ensemble des pays démocratiques où ils cherchent refuge ", comme le déclarait encore le président de la Croix-Rouge.

Tous ces responsables qui approuvent finalement le gouvernement sur le fond savent très bien que ces Kurdes irakiens, ces Afghans, fuient des pays dévastés par la misère et la guerre, et n'ont vraiment plus rien à perdre.

C'est bien parce que le système capitaliste continue à appauvrir la partie sous-développée de la planète et à y semer la guerre, que des milliers d'immigrants tentent ce qu'ils considèrent comme leur chance dans les pays riches.

Les États français, anglais ou américain peuvent bien multiplier de nouveaux murs, construire plus de barbelés, faire venir des bataillons toujours plus importants de CRS et transformer leurs pays respectifs en forteresses, ils ne pourront jamais empêcher que des vagues de pauvres chassés de chez eux par la misère viennent frapper à la porte, là où est concentrée la richesse. Ils ne peuvent pas, malgré leur armada répressive, leurs polices des frontières, empêcher par exemple que des milliers de pauvres du Mexique et d'Amérique du Sud tentent de franchir le Rio Grande, que des Africains cherchent à traverser le détroit de Gibraltar, ni empêcher ceux du moins qui n'y laissent pas leur vie de tenter plusieurs fois leur chance.

Le problème n'est pas de discuter où l'on peut accueillir " la misère du monde " ou si tel pays riche peut le faire, ou non. Le problème est de supprimer la misère, en supprimant une organisation économique qui l'engendre inévitablement. Et dans l'immédiat, la moindre des choses serait d'accueillir humainement ceux qui tentent d'y échapper.

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