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Irak : Derrière le paravent de l'ONU, la realpolitik de l'impérialisme
La chasse aux prétendues " armes de destruction massive " de Saddam Hussein a commencé le 18 novembre en Irak, avec l'arrivée sur le terrain des premiers inspecteurs de l'ONU. Mais déjà, avant même que les envoyés onusiens aient établi leurs quartiers à Bagdad, les voix se multiplient dans les capitales impérialistes pour affirmer que rien de tout cela n'empêchera la guerre.
Cela fait déjà longtemps que le vice-président américain Dick Cheney et son collègue à la Défense, Donald Rumsfeld, répètent à qui veut les écouter que ces inspections, comme d'ailleurs toute la politique apparemment conciliatrice menée par Bush vis-à-vis de l'ONU, ne sont qu'une perte de temps.
Mais désormais, à leurs voix se sont jointes celles de membres de l'administration Bush disant officieusement que Hans Blix, le chef suédois des inspecteurs de l'ONU, n'aura pas la " fermeté " qu'il faudrait face à Saddam Hussein - et, par voie de conséquence, qu'il faudra de toute façon recourir à la guerre.
Et puis il y a ceux, les mêmes ou d'autres, qui commencent à interpréter à leur façon la fameuse résolution de l'ONU. Ainsi commence-t-on à déclarer que les tirs de riposte des batteries anti-aériennes irakiennes aux attaques des bombardiers anglo-américains seraient en contravention avec cette résolution. Qu'importe le fait que ni celle-ci, ni d'ailleurs aucune de celles qui l'ont précédée, n'a jamais autorisé les États-Unis ou la Grande-Bretagne à bombarder l'Irak comme ils le font depuis douze ans ! Cela n'empêche pas les partisans de la guerre d'invoquer un " argument " de plus.
Tout cela n'a, il est vrai, rien de nouveau. Ce n'est que le prolongement des douze ans de guerre larvée qu'a déjà subis la population irakienne. Et on peut s'attendre à ce que se répète aujourd'hui la même farce ubuesque qu'avait orchestrée Clinton dans les années 1990, en faisant monter les exigences des inspections onusiennes de plus en plus haut, jusqu'à ce que Saddam Hussein n'ait plus d'autre choix que de mettre les inspecteurs à la porte en 1998.
À cette différence près, néanmoins, que cette fois, la farce des diktats impérialistes se joue sous la menace d'une invasion militaire et dans le contexte d'un état de guerre consciemment entretenu par les dirigeants des grandes puissances.
De toute façon, l'ONU et son apparat ne sont là que pour donner une apparence de légitimité aux choix que feront Bush et ses acolytes. Quelles que soient les prétendues " concessions " faites par Bush à Chirac ou à Poutine, la résolution qu'il a obtenue du Conseil de sécurité est assez floue pour devenir un blanc-seing en cas de besoin. Et cela d'autant plus facilement que les Chirac et autres dirigeants des impérialismes de seconde zone ne veulent pas que leurs trusts nationaux soient les laissés-pour-compte d'un éventuel règlement final en Irak.
Alors, quels seront les choix des dirigeants américains ? On ne peut le savoir. Aussi belliqueux que puissent être les Rumsfeld et les Cheney, l'impérialisme américain doit néanmoins prendre en compte non seulement les victimes militaires que sa propre opinion publique est prête à tolérer du côté américain, mais aussi l'impact d'une guerre dans cette région du Moyen-Orient qui compte parmi les plus instables de la planète, mais aussi parmi les plus vitales pour les profits des trusts impérialistes.
En attendant, les dirigeants américains font tout ce qu'il faut pour garder toutes leurs options ouvertes.
Ils accentuent leur pression sur l'Irak, sur lequel ils font peser d'ores et déjà la menace d'une guerre catastrophique pour la population, et peut-être même, à plus brève échéance, celle d'une recrudescence de bombardements massifs tels que ceux de l'opération " Renard du Désert ", en 1998. En même temps, ils accumulent dans la région des moyens militaires suffisants pour leur permettre de lancer une offensive s'ils la décident.
En même temps, ils continuent à entretenir le climat de guerre aux États-Unis mêmes, à la fois par voie médiatique, avec le matraquage qui continue à entourer la " guerre contre le terrorisme " et par des mesures d'exception, telles que ce plan des services secrets américains, révélé par le quotidien New-York Times, qui désigne tout résident d'origine irakienne aux États-Unis comme un terroriste en puissance.
La situation actuelle est déjà lourde de dangers, car même en l'absence de guerre ouverte, plus l'état de guerre se prolonge et plus la note à payer pour les populations sera lourde. En Irak d'abord, où la population continuera au mieux à subir les privations liées au blocus de l'ONU, et peut-être bien pire. Mais aussi aux États-Unis, voire peut-être à un moment ou un autre en France, où c'est à la population laborieuse que les États finiront par présenter la facture de l'union sacrée contre le terrorisme et du gonflement des budgets militaires, sans parler des dérives réactionnaires que ce genre d'atmosphère peut engendrer dans bien des aspects de la vie sociale.
Derrière cet état de guerre, c'est tout le système de domination de l'impérialisme qui se manifeste, un système d'oppression dirigé contre les peuples pour préserver les intérêts des trusts, un système d'oppression qu'il faudra mettre à bas.